Voici une des toutes dernières dépêches de l'AFP concernant la Côte d'Ivoire.
Crise ivoirienne: Gbagbo marque des points avant un sommet africain
De Emmanuel PEUCHOT (AFP) – Il y a 3 heures
ABIDJAN — Alors que l'Afrique avait d'abord soutenu presque unanimement Alassane Ouattara comme vainqueur de la présidentielle ivoirienne, le chef d'Etat sortant Laurent Gbagbo, qui n'entend pas céder, semble marquer des points avant un important sommet de l'Union africaine (UA).
A l'issue d'une visite surprise à Abidjan, la déclaration mardi soir du président en exercice du l'UA, le Malawite Bingu wa Mutharika, a symbolisé les lézardes du front africain.
Sans mentionner M. Ouattara qu'il avait pourtant aussi rencontré, il a promis de présenter les "propositions" de son "frère et ami" Laurent Gbagbo, lors du sommet de l'UA à Addis Abeba les 30 et 31 janvier, pour résoudre la crise née de la présidentielle du 28 novembre.
Le virage est spectaculaire: début janvier, M. Mutharika avait appelé "Gbagbo à céder le pouvoir à Ouattara pour (...) éviter un bain de sang".
Rien à voir non plus avec le médiateur de l'UA, le Premier ministre kényan Raila Odinga, après l'échec de sa dernière mission le 19 janvier, qui parlait de "monsieur Laurent Gbagbo" et du "président élu Ouattara", dont l'élection a été avalisée par l'UA dès le 4 décembre, comme par la quasi-totalité de la communauté internationale. M. Odinga avait même suggéré l'emploi de la manière forte si Laurent Gbagbo s'entêtait.
Depuis, l'idée d'un recomptage des voix, proposée par Gbagbo et refusée par son rival, fait son chemin dans l'esprit de certains dirigeants africains, de plus en plus rétifs à l'option militaire brandie par l'Afrique de l'Ouest -surtout le Nigeria- pour déloger M. Gbagbo.
Le président sud-africain Jacob Zuma a ainsi souhaité "quelque chose d'autre que demander à l'un des deux chefs de partir" et Yoweri Museveni (Ouganda) a plaidé pour "une approche sérieuse concernant l'examen du processus" électoral.
Le chef d'Etat équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema devrait proposer au sommet de l'UA, dont il pourrait prendre la présidence tournante, la création d'une "commission spéciale sur le règlement" de la crise, privilégiant "une solution pacifique" souhaitée aussi par l'Angola, important allié de M. Gbagbo.
Le président ivoirien sortant "a réussi à fédérer autour de lui les pays qui sont frustrés par l'hégémonie occidentale, par idéologie anticolonialiste, mais aussi certains pouvoirs autoritaires qui ne voient pas d?un bon oeil l?ordre donné à Gbagbo de partir, surtout à la lumière de ce qui se passe en Tunisie", analyse une source diplomatique africaine interrogée par l'AFP.
"Ceux qui étaient curieusement silencieux jusque-là et dont les langues se délient aujourd'hui ne sont pas les plus démocrates. Ils voient bien que ce qui se passe en Côte d'Ivoire les met en danger chez eux", assure Anne Ouloto, porte-parole de M. Ouattara.
Hors des considérations de principe, un recomptage des voix soulève aussi de sérieuses questions pratiques, fait valoir une source diplomatique occidentale. "Où sont les bulletins, les urnes? Quelles ont été les conditions de stockage? Le recomptage n?est pas possible", tranche-t-elle, alors que le camp Gbagbo y voit le moyen de sortir de l'impasse.
Si, sur la scène diplomatique, l'étau semble se desserrer autour de M. Gbagbo, la partie reste cependant difficile pour lui sur le plan économique, M. Ouattara, ses alliés d'Afrique de l'Ouest et la communauté internationale tentant de l'asphyxier financièrement.
Lundi, Alassane Ouattara a ainsi ordonné un arrêt des exportations de cacao, dont la Côte d'Ivoire est le premier producteur mondial et selon le Financial Times de mardi, le groupe agroalimentaire américain Cargill, premier négociant de cacao dans le monde, aurait d'ores et déjà "suspendu temporairement" ses achats ivoiriens.
Preuve que la menace est prise au sérieux, un ministre du camp Gbagbo a dénoncé mercredi une volonté d'"affamer" les Ivoiriens.
Comme je l'ai déjà rapporté ici, tous ceux qui sont amenés à se plonger dans le dossier du conflit post-électoral ivoirien sont obligés de reconnaitre qu'ils ont été un peu ou beaucoup abusés par Mr Choi (patron de l'ONUCI), par certains membres de la CEDEAO, par le couple franco-américain et par Mr Ouattara.
L'AFP dévoile même la prochaine campagne de désinformation à mettre en oeuvre au cas où la demande de L.Gbagbo serait retenue par l'UA (Union Africaine). Les arguments à opposer à cette solution de bon sens, l'impossibilité de recompter les voix !!!
Le problème pour ceux qui prôneront l'impossibilité de recompter les bulletins de vote c'est que le réexamen des résultats du deuxième tour ne passe pas par un recomptage de ces bulletins de vote mais par un controle des bordereaux des bureaux de vote. C'est ce qui permettra de constater que dans de très nombreux bureaux du nord de la Côte d'Ivoire il y a eu plus de votants que d'inscrits et parfois dans des proportions inimaginables. Cela permettra aussi de constater que dans de nombreux bureaux de vote où L.Gbagbo avait obtenu des voix au premier tour, il n'en avait parfois plus aucune au second tour ou beaucoup moins.
Cela permettra peut-être de comprendre en examinant tous ces documents qui ont été simultanément adressés à la commission électoral indépendante, au conseil constitutionnel et à l'ONUCI comment les 70% de votants constatés à la fin du deuxième tour se sont transformés en 81% lors de l'annonce de la victoire de Mr Ouattara.
Enfin l'ONUCI sera bien obligée de fournir les rapports de l'ensemble des observateurs effectivement présents sur le terrain lors de ce deuxième tour des élections et pas seulement les synthèses des chefs observateurs confortablement installés dans leur bureau d'Abidjan. Car Mr Choi a bien reconnu que tout n'avait pas été parfait dans les bureaux de vote mais il continue d'affirmer qu'il a "apprécié" les tricheries et les fraudes commises (particulièrement dans la zone sous controle rebelle) et que cela ne remet pas en cause le résultat final qu'il reconnait avoir été contraint de certifier.
Est ce une façon d'accompagner des élections qui se voulaient libres et transparentes?
Personnellement je ne me pose pas cette question mais je la pose parce que j'ai compris qu'un bon nombre de ceux qui défendent la victoire de Mr Ouattara le font car ils n'imaginent pas que l'ONU ait pu être aussi négligente et faible face au camp Ouattara.
J'espère que toute la lumière sera faite sur ce qui s'est réellement passé lors de ce second tour des élections présidentielles en Côte d'Ivoire.
Mais rien ne me fera admettre la position de l'ONU qui depuis 2005 a multiplié les pressions sur le camp de L.Gbagbo pour organiser des élections alors que cette même ONU n'a jamais été capable de mettre en oeuvre les conditions pour que ces élections soient libres et transparentes, c'est à dire le regroupement, le casernement et le désarmement des rebelles de Mr Ouattara, alors que ce désarmement ainsi que les élections ont toujours été liés dans la totalité des accords signés par les deux parties avec l'aval de l'ONU depuis 2003 (accord de Linas Marcoussis) à 2007 (accords de Ouagadougou) !!!
Dr Michel Lambret