GARRIGUE

Abonné·e de Mediapart

3 Billets

0 Édition

Billet de blog 10 août 2013

GARRIGUE

Abonné·e de Mediapart

SCRUTIN MAJORITAIRE ET GRANDES IDEES

GARRIGUE

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

SCRUTIN MAJORITAIRE ET GRANDES IDEES

Malgré la torpeur estivale, la déclaration de M. Borloo, président de l’UDI,  reproduite dans Le Figaro du 8 août 2013, selon laquelle « le scrutin majoritaire, c’est le gaullisme, les grandes idées à la noix qui écrasent les petites… », ne peut manquer de faire sursauter.

D’abord, parce que l’adoption du scrutin majoritaire en 1958, alors demandée par Guy Mollet et la SFIO, et préconisée depuis longtemps dans l’entourage du général de Gaulle, par Michel Debré et par René Capitant, a été l’un des grands éléments de clarification de la vie publique dans notre pays. C’est le scrutin majoritaire qui donne le pouvoir démocratique de choisir aux citoyens et qui fonde des majorités stables au Parlement.

Certes, le scrutin majoritaire peut avoir un aspect réducteur en écartant les nuances de l’expression politique et en rendant particulièrement difficile la représentation des opinions nationalement minoritaires. Ceux qui ont tenté d’affirmer une existence politique en dehors des grandes formations, et j’en suis, en ont souvent fait la douloureuse expérience.

Mais, plus que le scrutin majoritaire, c’est en réalité la crispation de notre système politique depuis l’adoption du quinquennat et l’introduction du séquencement élection présidentielle-élection législative qui a considérablement réduit et donc appauvri la diversité de la pensée politique dans notre pays. Dans ce nouveau système institutionnel, qui résulte de l’accord Chirac-Jospin de 2002, et qui avait pour finalité d’éviter les situations de cohabitation, le poids du Président de la République devient plus déterminant que jamais. Sachant que leur investiture future et leur réélection éventuelle se trouvent désormais directement liées à la décision, pour ne pas dire au bon vouloir, du président en exercice, les parlementaires de la majorité se trouvent plus que jamais en état de soumission. Et aux yeux de l’opinion, l’élection législative n’est plus que le troisième tour de l’élection présidentielle dont elle amplifie généralement le verdict.

Observons à ce propos, que le général de Gaulle s’était toujours refusé à lier élection présidentielle et élection législative car, dans sa vision institutionnelle, qui donnait la primauté au suffrage universel, chacune de ces élections, séparées dans le temps, constituait un test indispensable de légitimité.

Si l’on veut revenir à l’esprit véritable de la Vème République et à un équilibre des pouvoirs qui donne un peu plus de poids à l’Assemblée Nationale, il n’y a qu’une solution : réduire d’un an le mandat de l’Assemblée. Tout président de la République, même s’il use du pouvoir de dissolution aussitôt après son élection, devra affronter une élection législative en cours de mandat. Et dans une telle élection, les opinions plus nuancées, voire minoritaires, trouveront mieux leur place, car elles exprimeront alors des potentialités que l’alternative brute du second tour de la présidentielle fait disparaître.

Quant aux « grandes idées à la noix » du gaullisme –la restauration des finances publiques, le volontarisme économique, l’indépendance de décision pour la France et pour l’Europe, l’association des salariés aux décisions et aux résultats-, que M. Borloo réfléchisse : elles sont certainement plus d’actualité qu’il ne le pense. Ce qui manque aujourd’hui, ce ne sont pas les petites idées, ce sont les grands desseins… ou les grands hommes.

Daniel GARRIGUE.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.