L'analyse des différentes candidatures réelles ou potentielles à la primaire pourrait laisser croire que nous nous préparons à un remake un peu triste d'un congrès du Parti socialiste. Ce serait oublier que la règle du jeu a changé et qu'aujourd'hui, avec un corps électoral élargi, nul ne sait quel est la réalité du rapport de force entre ces candidats.
Avec le retrait de plus en plus certain de Martine Aubry, la primaire pourrait ressembler étrangement au congrès de Reïms, avec les représentants des 4 principaux courants de ce congrès et quelques changements de casting :
* La motion A, qui était portée par Bertrand Delanoë (25,24% des voix), serait représentée par François Hollande.
* La motion C, qui était portée par Benoit Hamon (18,52% des voix), serait toujours représentée par Benoit Hamon.
* La motion D, qui était portée par Martine Aubry (24,32% des voix), serait représentée par DSK.
* La motion E, qui était portée par Ségolène Royal (29,08%), serait représentée par Ségolène Royal.
Le jeu semble ainsi très ouvert. La victoire de DSK ne semble plus inéluctable. Ségolène Royal peut de nouveau croire en ses chances. François Hollande peut continuer à passer progressivement du statut d'outsider à celui de challenger.
Cette analyse ne tient cependant pas compte du fait que, depuis le congrès de Reïms (novembre 2008), trois années ont passé et beaucoup de choses ont changé. La côté de popularité de Ségolène Royal s'est effondrée et elle a été abandonnée par la quasi-totalité de ses soutiens, à un tel point qu'elle semble même avoir perdu le contrôle de son propre courant, au bénéfice de Vincent Peillon. Benoit Hamon s'est progressivement normalisé, en jouant le rôle de porte parole du parti et il a vu partir une part de ses soutiens vers le Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon. Les amis de Pierre Moscovici, qui avait soutenu la motion de Bertrand Delanoë, ne soutiendront pas François Hollande, mais DSK.
Surtout, cette analyse ne tient pas compte du fait que le corps électoral ne sera pas du tout le même lors des primaires. Si nul ne sait aujourd'hui combien de personnes participeront aux primaires, il est certain qu'il y aura au moins dix fois plus de votants. Ainsi, les quelques dizaines de milliers de militants socialistes ayant voté lors du congrès de Reïms ne pèseront pas grand chose face aux centaine de milliers de votants qui participeront à la primaire.
Tout est donc possible. Les équilibres internes au Parti socialiste ne peuvent plus servir de cadre de référence, pour le pire, mais, surtout, espérons-le, pour le meilleur!