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Billet de blog 26 août 2010

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Guéant ou Hortefeux à Matignon?

Le Président de la République a annoncé qu'il nommerait un nouveau gouvernement au cours de l'automne 2010. S'il décide de nommer un nouveau Premier ministre, il semble peu probable qu'il choisisse Michèle Alliot-Marie ou Jean-Louis Borloo. Son choix se portera plus vraissemblablement sur Claude Guéant ou Brice Hortefeux.

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Le Président de la République a annoncé qu'il nommerait un nouveau gouvernement au cours de l'automne 2010. S'il décide de nommer un nouveau Premier ministre, il semble peu probable qu'il choisisse Michèle Alliot-Marie ou Jean-Louis Borloo. Son choix se portera plus vraissemblablement sur Claude Guéant ou Brice Hortefeux.

La nomination de Michèle Alliot-Marie ou de Jean-Louis Borloo aurait le mérite de donner une nouvelle dynamique à la majorité présidentielle qui a tendance à s'étioler actuellement. En effet, la nomination de Michèle Alliot-Marie serait bien perçue par l'UMP et par les Gaullistes historiques. La nomination de Jean-Louis Borloo serait bien accueillie par les centristes et l'aile plus modérée de l'UMP. L'opinion publique percevrait probablement de façon favorable ces nominations qui, si elles ne sont pas révolutionnaires, auraient le mérite de conduire à Matignon une personnalité populaire qui a fait ses preuves dans ses fonctions ministérielles. Ils sont en effet tous les deux membres du gouvernement depuis 2002, sans interruption, et ont occupé des fonctions importantes (ministères de la défense, de la justice et de l'intérieur pour Michèle Alliot-Marie ; ministères des affaires sociales, de l'économie et du développement durable pour Jean-Louis Borloo).

Cependant, ces hypothèses semblent peu crédibles car Nicolas Sarkozy va avoir besoin d'un Premier ministre en qui il aura une confiance absolue pour coordonner l'action gouvernementale et pour préparer l'élection de 2012. Or, Michèle Alliot-Marie et Jean-Louis Borloo sont des personnalités indépendantes qui ont construit leurs carrières de façon autonome et pourraient même constituer des rivaux dans la perspective de 2012.

Surtout, l'étude de la pratique des institutions sous la 5ème République montre que, si la quasi-totalité des Présidents de la République ont commencé leur mandat avec un Premier ministre dont le poids politique s'était affirmé pendant la campagne présidentielle (Chirac pour VGE en 1974, Mauroy pour Mitterrand en 1981, Rocard pour Mitterrand en 1988, Juppé pour Chirac en 1995, Raffarin pour Chirac en 2002 et Fillon pour Sarkozy en 2007), ils ont terminé leur mandat, sauf en période de cohabitation, en s'appuyant sur un allié politique de longue date, voire un ancien collaborateur, qui avait un lien personnel fort avec lui. Ce fut notamment le cas pour Mitterrand en 1984, quand il choisit Fabius, qui avait été un de ses plus proches collaborateurs dans les années 1970, et en 1992, quand il choisit Beregovoy, ancien secrétaire général de l'Elysée de 1981 à 1982. Chirac fit le même choix en 2005, quand il nomma Dominique de Villepin, ancien secrétaire général de l'Elysée de 1995 à 2002.

Ces précédents renforcent l'hypothése d'une nomination de Claude Guéant, qui est le plus proche collaborateur de Nicolas Sarkozy depuis 2002 et sa nomination au ministère de l'Intérieur. Claude Guéant avait même suivi Nicolas Sarkozy à Bercy, devenant ainsi le premier directeur de cabinet du ministre de l'économie et des finances appartenant au corps préfectoral, et au Conseil général des Hauts-de-Seine. A moins de deux ans de l'élection présidentielle, Nicolas Sarkozy pourrait trouver bien des avantages à nommer Claude Guéant à Matignon car il pourrait compter sur sa loyauté sans faille pour coordonner l'action gouvernementale et s'appuyer sur l'expérience de celui qui fut aussi son directeur de campagne en 2007 pour préparer 2012. Enfin, Claude Guéant dispose d'une légitimité forte sur les questions de sécurité publique, en tant qu'ancien Préfet, ancien Directeur général de la police nationale et ancien directeur de cabinet du ministre de l'intérieur, qui sont aujourd'hui au coeur de l'actualité.

Cette hypothése souffre cependant de quelques limites. En effet, Claude Guéant, contrairement à Laurent Fabius, Pierre Beregovoy et Dominique de Villepin quand ils ont été nommés à Matignon, ne disposera d'aucune expérience ministérielle. Or, mis à part Michel Debré et Georges Pompidou, tous les Premiers ministres de la 5ème République avaient été auparavant ministre. Par ailleurs, il souffre d'un important déficit de notoriété et sa nomination ne serait pas un signe fort vis-à-vis de l'opinion publique. Enfin, de nombreux parlementaires et ministres de la majorité n'apprécient pas qu'il puisse jouer un rôle si important auprés du Président de la République alors qu'il n'a jamais été élu.

C'est pour cette raison qu'il convient d'étudier également l'hypothèse d'une nomination de Brice Hortefeux à Matignon. Comme Claude Guéant, Brice Hortefeux est un ancien collaborateur de Nicolas Sarkozy, à la Mairie de Neuilly (1983-1993), au ministère du budget (1993-1995), au ministère de l'intérieur (2002-2004) et au ministère de l'économie et des finances (2004). Il est surtout un ami personnel de Nicolas Sarkozy depuis le milieu des années 1970 et il est notamment le parrain de son fils, Jean Sarkozy. Par ailleurs, Brice Hortefeux, contrairement à Claude Guéant, dispose d'une importante expérience ministérielle, au ministère délégué aux collectivités territoriales (2005-2007), au ministère de l'immigration et de l'identité nationale (2007-2009), au ministère des affaires sociales (2009) et au ministère de l'intérieur (depuis 2009). Au cours des derniers mois, il a acquis une légitimité importante dans la lutte contre l'insécurité, qui constituera certainement un des axes de campagne de Nicolas Sarkozy en 2012. Enfin, ayant adhéré au RPR à sa création, il est un des principaux dirigeants politiques de l'UMP depuis plus de dix ans. Il en connait ainsi parfaitement le foncionnement et dispose d'une véritable légitimité auprés des militants et, surtout, des élus de ce parti.

Le mois d'octobre nous permettra d'observer si ces hypothèses étaient juste. En tout cas, personnellement, au-delà de leur logique politique et institutionnelle, elles ne me réjouissent pas!

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