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Billet de blog 1 avril 2010

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Plaidoyer pour une unification à terme des caisses de retraite des Salariés de tous secteurs

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Introduction

La société française est immobile depuis très longtemps, depuis trop longtemps. Le monde autour de nous bouge tous les jours davantage et plus vite, et nous, français, n'avons pas fait évoluer nos systèmes sociaux de manière significative depuis tant d'années pour en assurer leur pérennité et assurer une équité de traitement pour leur droit à retraite à tous les salariés français. Il y a 30 ans déjà que l'on aurait dû commencer à harmoniser nos systèmes salariaux, or cette transformation n'a pas été proposée aux français et ce malgré des changements bien connus et très profonds, démographiques, dans le marché du travail, et dans les besoins de mobilité professionnelle tout au long de leur carrière exprimés par les salariés eux-mêmes.

Nous sommes malheureusement pris dans des cycles politiques toujours très courts entre deux élections, et les différents pouvoirs politiques successifs n'ont pas été assez ambitieux ni courageux pour aborder de front ce grand sujet pour le pays dans sa complétude; nombre de trimestres cotisés et âges de départ, prise en compte de la pénibilité, homogénéité des systèmes de rémunération salarié et d'indemnisation retraites, passerelles entre les divers systèmes aujourd'hui étanches entre eux [2], et enfin mais essentiel, rendre le calcul de droits à pension « équitable » pour les salariés ayant été mobiles entre plusieurs caisses.

A bien plus long terme, il faudra également travailler à la préparation d'une compatibilité entre les différents systèmes de retraites entre pays de l'Union Européenne.

Les lois de 1993 (Balladur) et de 2003 (Fillon), puis la réforme des régimes spéciaux de 2007 [1] n'ont pas été à la hauteur des enjeux, on a même fait en 2007 une réforme qui sera plus onéreuse à compter de 2020 ... que si elle n'avait pas été ! Un comble.

L'objet de ce papier est de présenter et ainsi de tenter à son humble mesure de promouvoir l'idée d'un besoin d'harmonisation global des systèmes sociaux de tous les salariés français quels que soient leurs statuts, il faut y inclure les chômeurs.

Ce système unifié a un nom, c'est le système de retraite par répartition et par points. Il était inscrit au programme de Nicolas Sarkozy de 2007, mais a été semble-t-il abandonné en chemin, car trop complexe à mettre en place, et il fait également partie des préconisations de la CFDT et également du Modem.

L'expliciter, c'est permettre d'en définir très concrètement les grandes lignes directrices et de démarrer une campagne d'adhésion qu'il faut massive, chose indispensable à la réussite éventuelle de ce projet d'envergure qui doit se faire s'il devait pouvoir se faire bien au-delà des clivages partisans habituels de la société française.

S'il devait se faire, ce serait par consensus.

Si accord, quel accord sur les retraites pour l'échéance fixée à Septembre 2010 par le chef de l'Etat ?

Le 15 Avril 2010, le Conseil d'orientation des retraites (COR) rendra un rapport très important qui servira de support de base aux négociations sociales à venir sur les modifications nécessaires du droit à retraite entre les partenaires sociaux, les syndicats de salariés et les organisations patronales, ce avant que l'Etat ne légifère.

Le calendrier pour parvenir à un accord à été imposé par l'Etat, il s'agit de terminer les négociations en Septembre 2010, c'est très court, les syndicats avaient demandé jusqu'à Décembre, le chef de l'Etat voulait Juin, en définitive ... ce sera Septembre.

Or nous avons déjà pu constater que les discussions seront limitées et les parties sont déjà recroquevillées sur des positions conservatrices loin d'un consensus évoqué plus haut.

Les syndicats de salariés d'un côté demanderont vainement la bonne mesure de prise en compte de la pénibilité et des financements au-delà du sacro-saint bouclier fiscal à 50%, mettant actuellement à mal la tradition fiscale française depuis 1789 de la progressivité de l'effort demandé à chacun devant l'impôt, surtout en période de crise.

D'autre part côté patronal, on voit poindre la demande de faire effectuer plus de trimestres de travail aux salariés sur une vie, à la constatation d'ailleurs vraie que l'espérance de vie augmente.

Bref, même à minima sur un âge et sur un nombre de trimestres de cotisations, avec un soupçon de prise en compte de la pénibilité, ces négociations sont très mal engagées, elles seront en tout cas ardues, les accrochages ont commencé sur les demandes de chiffrages du Medef à Bercy pour le rapport du 15 Avril sur un âge de départ au-delà de 60 ans, et les résultats de ces négociations, malgré l'art de la tactique de Nicolas Sarkozy sont très incertains tant le risque de blocage est grand vu la situation de défiance des uns vis-à-vis des autres dans cette affaire.


La démocratie sociale en question

La représentation des usufruitiers des prestations sociales que sont les pensions de retraites à la table des négociations pour prendre les décision touchant aux revenus d'une si importante part de la population du pays pose question. Les chômeurs et les retraités ne sont pas du tout partie prenante aux discussions au prétexte qu'ils ne contribuent pas aux ressources des caisses délivrant ces prestations sociales. Nous devrions traiter les choses de manière plus ouverte et plus transparente, et considérer en égaux tous les contributeurs et bénéficiaires a ces prestations sociales. Ceci permettrait de considérer les diverses situations dans un climat apaisé d'égalité dans notre citoyenneté.

La représentativité syndicale est aujourd'hui entachée d'un grand manque de légitimité du point de vue des salariés, les syndiqués sont peu nombreux dans les effectifs au regard du poids de leur représentation leur donnant facilement le droit de signer des accords d'entreprises. On dit qu'ils ne seraient que 5% dans le privé et à peine 15% dans le secteur public plus syndicalisé, ce qui est on le voit bien trop peu. Ceci vient de plusieurs causes, du fait que les carrières des salariés syndiqués sont la plupart du temps injustement à l'index de leurs employeurs sans que ce ne soit flagrant, que l'image des syndicats est connotée négativement en référence aux grands mouvements de grèves connus par le passé, et il est vrai que dans certains cas il arrive que des salariés peu dynamiques se cachent derrière le statut de salarié protégé lié au mandat d'élu pour en tirer abusivement un bénéfice personnel ce qui ne plaît pas.

La lois d'Aout 2008 modifie la représentativité syndicale, elle impose la perte de représentativité irréfragables aux 5 syndicats (issue des accords inspirés du CNR après-guerre), et depuis le 1er Janvier 2009 tout syndicat pouvant signer un accord collectif doit avoir obtenu au moins 10% des suffrages exprimés lors du 1er tour des élections CE ou à défaut DP d'entreprise. Cette nouvelle arithmétique, compte tenu du faible nombre de syndiqués, met les syndicats de fait dans une situation de plus grande concurrence, et voire permet dans certains cas (de désert syndical) le jeu de syndicats « maison » montés de toute pièce par le patronat au débit de l'intérêt des salariés.

Vu l'ampleur des travaux de transformation à entreprendre pour unifier nos caisses et mettre en place les justes attributions en points entre les différents calculs actuels, cette situation de manque de légitimité des interlocuteurs clef à la table des négociations dans les organismes payeurs cogérés par les syndicats doit absolument pouvoir être modifiée dans le sens d'une bien plus grande légitimité et de gage de stabilité dans le temps. Faute d'une telle garantie il n'y aurait aucune possibilité d'accorder le pays sur nos ambitions pour lui, c'est-à-dire la mise en place de cette répartition unifiée des droits à retraite.

Je plaide donc pour une syndicalisation systématique de tout salarié français comme c'est déjà la tradition en Europe du nord, charge au salarié de choisir l'adhésion au syndicat de son choix librement. Quelles que soient nos réticences sur cette proposition, comme pays du Sud de l'Europe nous avons le grand tort de favoriser les générations installées et de sacrifier celles qui n'ont pas encore émergé et c'est un manque de courage et de dignité qu'il faut changer. Par contre, nous devons absolument éviter le travers de conditionner des bénéfices qui seraient liés à l'appartenance d'un salarié à un syndicat et globaliser tout accord à l'ensemble des salariés d'une entreprise, ceci pour annihiler toute velléité de quelque tentation de clientélisme et d'esprit de favoritisme de clan au débit du sens de l'intérêt général des salariés.


Les écarts entre retraites de Salariés du public et des divers secteurs privés

Les salariés du Public ne cotisent pas a une caisse de retraites contrairement a ceux du secteur privé, ils ne cotisent pas du tout non plus pour le chômage alors qu'ils en sont statutairement protégés, les prélèvements salariaux ne sont donc pas aux mêmes taux, leurs pensions (calcul sur les 6 derniers mois de traitement en activité hors primes qui sont de l'ordre de 30% du total), mais aussi leurs traitements sont de structure assez différentes des salaires du secteur privé. Force est de constater que l'on ne peut pas comparer si simplement les situations, et au passage d'un système à l'autre, c'est extrêmement pénalisant financièrement pour le salarié.

Notons qu'entre différents secteurs du privé il existe tout autant des couperets qui rendent aussi impossible sans une perte bien trop importante de pension de retraite toute velléité de mobilité entre secteurs économiques totalement étrangers du point de vue de leurs caisses pour des raisons purement administratives subies aujourd'hui. Il y a des centaines de caisses.

Les salariés du secteur public et du secteur privé sont sans arrêt stigmatisés par le pouvoir politique, soit à considérer exagérément sous les mandats de Droite que le secteur public serait « protégé » et peu productif alors que le secteur privé serait lui par opposition rentable et « productif ». Sous les mandats de Gauche, on compte sur le vote des fonctionnaires à qui on aurait tendance à accorder des avantages dispendieux pour les aguicher. C'est une instrumentalisation de la population insupportable à visées électoralistes de courte vue qui divise profondément les français.

Pour faire cesser le jeu de ces divisions idéologiques bien peu au fait des réalités des dernières évolutions imposées aux deux principaux groupes de salariés du pays qui pour beaucoup souffrent, il faudrait rendre compatibles des systèmes de gestion multiples, incompatibles et souvent très archaïques. Ceci permettrait sans pénalisation financière à outrance sur les calculs des retraites d'offrir des carrières croisées et « à la carte » permettant de vrais choix de parcours diversifiés entre secteurs aujourd'hui étanches entre eux et qui l'interdisent. Il faudrait permettre en plus cette souplesse des congés sabbatiques facilités, gage de projets personnels.

Une vraie mobilité professionnelle serait donc enfin rendue possible entre secteurs. De plus cette souplesse amènerait une richesse supplémentaire, un bassin d'emplois rendus de fait plus disponibles à la demande des employeurs, contribuant ainsi à la diminution pour partie de la gangrène du chômage structurel élevé.

 

Conclusion

Même si ne sont pas abordés sciemment dans cette ébauche de proposition pour simplifier et rendre le sujet compréhensible les points suivants, néanmoins très importants que sont; l'inégalité des hauts salaires car bénéficiant de prestations de caisses complémentaires (en gros les cadres) vis-à-vis des bas salaires, le problème des petites retraites, des retraites des personnes à temps partiel, des retraites de réversion, le phénomène de suppression exponentiel du recrutement de fonctionnaires pour les remplacer graduellement par des personnels non statutaire au statut bien plus précaire et moins sécurisant que celui du secteur public et même que celui du privé, un cadre global est quand même posé.

Ce cadre a pour mérite de pouvoir servir de base à un approfondissement nécessaire de ce qui serait un changement majeur qui transformerait le lien entre les français et leur relation au paysage social au travail.

Bien entendu on ne peut imaginer envisager le succès d'un tel projet aussi ambitieux si le climat actuel de défiance et de manque de sens de l'intérêt général devait perdurer entre partenaires sociaux, il est bien entendu que la condition du dialogue social doit être préalablement retrouvée, et il nous faut changer de logiciel, une négociation sociale réussie ne peut qu'être le fruit d'un très large consensus, et il ne saurait y avoir de gagnant ni de perdant.

Ces décisions engagent pour des générations, elles sont donc d'une nature autre que d'effectuer des simples ajustements à la marge de tels ou tels montants, assiette, ou plafonds des systèmes existants. Non, il s'agit bien d'opérer à une remise à plat complète et bien de la création depuis les premiers concepts d'un nouveau système de retraite unique et de définir les systèmes de transition entre les anciens systèmes vers ce nouveau système, de manière transparente et par des décideurs légitimés dans leur rôle.

Liens:

[1]: http://www.gouvernement.fr/gouvernement/la-reforme-des-regimes-speciaux-de-retraite
[2]: http://fr.wikipedia.org/wiki/Cat%C3%A9gorie:Retraite_en_France

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