Ces vers d'Aragon, tirés du poème, j'entends, j'entends, mis en chanson par Jean Ferrat, évoque avec angoisse ce que Marx a analysé dans son œuvre. Il s'agit de la capacité du système capitaliste à générer, comme le décrivait Platon dans son mythe de la caverne, l'illusion du caractère naturel, non discutable, de la marchandise. Marx parle du fétichisme de la marchandise qui occulte la réalité des rapports sociaux de domination mis en place par la bourgeoisie, après des siècles de luttes avec l'ordre féodal. Ce qui est nié, invisibilité, dans l'échange capitaliste, est l'extorsion de la survaleur produite par les travailleurs. À travers les prix, l'illusion est donnée à chacun que la marchandise à une valeur dépendante d'un marché doté de caractéristiques humaines. Les commentateurs boursiers font étalage de termes tels que, le marché réagit, le marché doute, anticipe,...avatar du bon dieu en quelque sorte. L'extorsion de la survaleur par l'exigence de profit, par la rente et l'intérêt, est absente de la conscience des travailleurs eux-mêmes. Ne pas comprendre que seul le travailleur crée de la richesse, quelle que soit son origine ou sa couleur de peau, aboutit à des obscénités telles que celle indiquant que les travailleurs immigrés coûtent au pays...alors qu'ils enrichissent les capitalistes!
De même, penser qu'un pouvoir garant des intérêts de la bourgeoisie puisse s'attaquer au chômage et viser le plein emploi avec des droits de haut niveau pour les travailleurs est une illusion. Le capital ayant nécessité de maintenir un taux de profit moyen élevé pour son accumulation, le maintien de salaires bas et simultanément le remplacement de la main-d'œuvre par des systèmes techniques, l'IA va faire des ravages..., le chômage est consubstanciel au capitalisme. L'obligation de travail gratuit pour certains bénéficiaires du RSA ne fait qu'illustrer la mise à disposition du patronat d'une main-d'œuvre à bas prix...