Qui n'a pas été rebuté par l'interpellation de tel ou telle représentant.e d'un parti politique ou d'un syndicat qui prétendait vous apporter la parole vraie, l'évidence, la voie unique?
Qui a déjà milité lors de campagnes électorales a pu constater la difficulté à entamer un échange avec les gens croisés sur un marché, au pied d'une cage d'escalier, etc.
Faire un détour sur ce qu'a mis en évidence le psychologue Vogotski notamment la notion de "zone prochaine de développement" issue de ses recherches sur l'apprentissage des savoirs semble être riche d'enseignements pratiques.
Pour Vigotski, pour adapter les apprentissages à la particularité de chaque apprenant, il est essentiel d'appréhender le "saut" cognitif, le pas en avant que chaque individu est capable de réaliser sans avoir le sentiment de mise en échec. Aussi bien sur le plan des notions pratiques que des concepts théoriques. À la différence près que ces derniers ne peuvent faire l'objet d'expérimentation par l'apprenant.
Les interpellations politiques, syndicales, etc. ressortissant plutôt du champ théorique (notions de justice sociale, de critique de l'économie politique, etc.) il est essentiel de ne pas asséner des "vérités" conceptuelles sans au préalable avoir une idée des représentations des individus sollicités à propos des sujets que le militant souhaite aborder. Il faut, pour qu'il y ait dialogue, même conflictuel, une rencontre possible entre la sphère de représentation du monde réel d'une personne et celle du militant qui prétend amener son interlocuteur vers ses propres convictions. Il faut mettre au jour cette "zone prochaine de développement" de l'interpellé. Le militant qui respecte le principe de l'égalité de dignité tirera profit de cette posture pour, en retour, questionner la validité de ses "vérités".