Les événements de Tunisie et d'Egypte ont donné une nouvelle confirmation aux thèses d'Emmanuel Todd. Ce dernier, historien et démographe, s'était fait connaître en annonçant dans son ouvrage La Chute finale l'écroulement de l'URSS, à partir de l'analyse des données démographiques.
Depuis, dans L'Invention de la France et L'Invention de l'Europe, il a mis au point un modèle d'analyse de l'évolution des sociétés basé sur deux facteurs: l'alphabétisation et les structures familiales. Les structures familiales, selon qu'elles sont autoritaires ou libérales, égalitaires ou inégalitaires, permettent d'expliquer les comportements politiques. Le taux d'alphabétisation explique lui, selon Todd, quasiment à lui tout seul, l'évolution vers la démocratisation. La Révolution française est la conséquence du mouvement d'alphabétisation déclenché lors du siècle des Lumières. Dans le monde arabe, les pays où ce taux était le plus élévé sont l'Iran et la Tunisie. Cette jeunesse alphabétisée est le déclencheurs des mouvements révolutionnaires.
Face à cette grille de lecture prédominait, au sein de la classe politique et des milieux diplomatiques, le modèle élaboré par S. Huntington du "Choc des civilisations".Selon Huntington, le monde est partagé entre cinq ou six grandes civilisations, relativement homogènes et fermées : l'Occident chrétien, le monde arabe, hindou, sino-japonais, etc. On voit que N. Sarkozy dans son discours du Puy-en-Velay n'est pas très éloigné de ce modèle. Surtout, il a servi à défendre la Realpolitik chère aux diplomates professionnels: cette idée qu'il faut prendre les choses comme elles sont et ne pas chercher à les changer vient d'être durement démentie par les événements récents. Au Choc des civilisations,désormais bon pour la poubelle idéologique, on préférera donc la lecture du dernier ouvrage d'Emmanuel Todd et Youssef Courbage, Le Rendez-vous des civilisations, paru en 2007.