Après des années de discussion, l’Assemblée nationale, lors du vote de la loi « Renforcer la prévention en santé au travail », a accordé l’accès à la médecine du travail aux 250 000 assistantes maternelles. 99 % de femmes exercent ce métier salarié, précaire, peu valorisé, elles sont indispensables au million de parents-employeurs qui ont recours à ce mode de garde pour leurs enfants : bonne nouvelle, elles accèdent enfin aux mêmes droits que les 18 millions d’autres salariés, celui de bénéficier de la médecine du travail de prévention, ce qui se justifie évidemment par leurs conditions de travail physiquement et moralement éprouvantes : troubles musculosquelettiques ; troubles circulatoires ; contaminations virales ou bactériennes par contact avec un enfant malade ; risques psychologiques eu égard aux responsabilités portées sur les épaules de ces professionnelles.
Mais alors pourquoi la même loi Macron Castex se permet-elle d’enjamber cette médecine du travail spécialisée et de prévention en donnant aux parents employeurs comme à tous les employeurs un pouvoir de police du « pass sanitaire » ? Elle permet au patron, précisément sans recours à la médecine du travail, de « mettre à pied » puis licencier pour cause de non-respect des obligations face la pandémie.
Dans l’incohérence de cette même loi, les employeurs des assistantes maternelles (et de tous les autres salariés) sont transformés, à la place des médecins du travail, en agents de contrôle sanitaires habilités à disposer de données de santé. C’en est fini du secret médical, de l’intimité de la vie privée ce n’est plus le médecin du travail qui prononce l’aptitude ou la non-aptitude, c’est le patron. Pousser, par la persuasion, à la vaccination à 100 % c’est une bonne chose, mais permettre au patron de sanctionner votre état sanitaire, c’en est une autre, infiniment dangereuse.
De quoi s’étonner qu’un Conseil Constitutionnel chargé du respect de la constitution puisse cautionner la révision de cet entrelac entre droit du travail et droit à la santé.
Gérard Filoche