Lors de la reparution de “l’Autre Journal” en 1990, le numéro trois, numéro double 380 pages de juillet août, consacre un dossier à l’ethnologue Jean Monod “voyage entre les hommes et les Dieux” ou l’ethnologue relate ses expériences vécues pendant sept années avec les indiens Piaroa d’Amazonie.
Dans son entretien “Le chemin de la liberté” Jean Monod dit:
“Il me semble étrange que nous ayons si peu conscience de notre espèce dans ses caractères essentiels et son histoire profonde. Pour les Piaroa, en tout cas, comme pour les Hopi ou les Iroquois, cet inconscience n’a rien de surprenant: à leurs yeux, nous sommes les fossoyeurs du monde. Le malheur, c’est que nous souscririons volontiers à ces anathèmes sans nous soucier de chercher le remède. Avec notre fierté moderne nous cultiverions plutôt notre mal. Cette fierté irait même nous faire trouver une certaine grandeur dans le défi perpétuel à des lois naturelles, auxquelles notre qualité essentielle d’hommes modernes serait de faire exception. Ce n’est qu’au bord du suicide collectif, lorsque par signes adverses, il nous menace, que l’impasse où nous ont conduit nos rédditions face à l’entreprise industrielle, nous mène par force, et non sans inquiétude, à réfléchir. Mais nous sommes devenu si futiles que nous attendons pour nous mettre en marche, que ce pas ait pris les allures d’une mode.”
A l’heure où l’on reparle d’autosuffisance alimentaire alors que depuis des décennies le FMI et la banque mondiale n’ont cessé de désorganiser les économies de subsitance des pays les plus pauvres, la mode des mots développement durable, biodiversité et écologie, semble aujourd’hui bien installée. Les crises planétaires, financières, monétaires, énergétiques et alimentaires qui se dessinent aujourd’hui, seront-elle enfin à la mode pour devenir les facteurs déclencheurs de la prise en compte de cette inconscience tragique dont parlait Jean Monod en 1990 ?
Billet déjà publié sur mon blog du monde.fr le 14 février 2008 et toujours d'actualité.