Au début du mois d'avril 1945, il y a soixante dix ans, les troupes américaines avaient traversé l'Allemagne et approchaient du camp de Buchenwald dans la région de Weimar. Les prisonniers de Buchenwald travaillaient dans l'usine d'armement DAW ( Deutsche-Ausrüstungs-Werke), détenue et exploitée par les SS ainsi que dans les ateliers et dans la carrière de pierre du camp. Les conditions de suvie y étaient particulièrement difficiles. Un grand nombre de détenus travaillaient aussi dans les commandos affiliés à l'administration centralisée du camp de Buchenwald. Il a été possible de dénombrer 88 camps satellites qui dépendaient du camp principal. Au début du mois d'avril 1945, alors que l'armée américaine approchait, les Allemands commencèrent à évacuer environ 28 000 prisonniers du camp principal et 10 000 prisonniers des camps satellites de Buchenwald. Environ un tiers de ces prisonniers mourut d'épuisement en route ou fut abattu par les SS. De nombreuses vies furent sauvées par une organisation clandestine de prisonniers dont les membres occupaient dans le camp des postes administratifs clés. Ils entravèrent l'exécution des ordres nazis et retardèrent l'évacuation du camp.
Il y a quelques années, après la mort de mon père, j'ai retrouvé un petit cahier, un journal où il raconte la fin de sa captivité. Arrêté en 1941, condamné à 5 ans de prison. Interné en France jusqu'en mai 1944 il sera ensuite déporté en Allemagne au camp de Buchenwald puis transféré dans le commando de Schönebeck. C'est un récit personnel d'un fragment de la libération des camps. C'est la tentative de témoigner de sa fuite in extremis pour échapper à l'évacuation organisée par les Allemands avant l'arrivée de l'armée Américaine.
Je l'ai proposé à la "Fédération nationale des déportés internés résistants patriotes" (FNDIRP), association dont mon père était membre de son vivant, pour leurs archives. Aucune réponse de leur part. Il me semble qu'un témoignage sous forme d'un journal peut donner un angle particulier sur un moment assez connu de l'histoire humaine. Je livre ce récit maintenant aux dates anniversaires correspondantes. Le journal commence le mercredi 4 avril 1945.