Chacun sait que si Hollande avait posé un ultimatum à l'Europe allemande, il eut certainement fait bouger, fait changer celle-ci : inconcevable sans une France - indispensable et fondatrice - qui eut menacé d'un Francexit, l'UE aurait bien été obligée de revenir à la préférence communautaire, de placer la BCE sous contrôle politique et d'avancer en matière d'harmonisation sociale en fortifiant donc les possibilités de solidarité .
La menace du Britexit va obtenir exactement le contraire : encore plus de libre échange au bénéfice ( notamment par le traité transatlantique ) du monde anglo saxon, la liberté monétaire au service du quantitative easing britannique parallèlement au maintien de l'asphyxie monétaire des Etats de la zone euro interdits de financements publics, l'exonération des pays les plus conservateurs ( dont la Grande Bretagne est aujourd'hui le très réactionnaire modèle) de toute amélioration de leurs situations sociales intérieures et leur dispense d'efforts de solidarités intra-européennes.
Car n'en doutons pas, l'alliance des coeurs est déjà faite entre Cameron et Merkel et les demandes anglaises seront entendues sur le fond, parce que ces leaders politiques partagent le même fanatisme libéral ainsi que le même goût pour les inégalités sociales ; et grâce aussi à la méthode choisie par Cameron : savoir s'appuyer sur son opinion nationale pour faire changer les choses dans le sens où il le souhaite. Ce dont nos dirigeants se sont révélés - à l'encontre du "non" au référendum de 2005 qu'ils ont trahi de toutes les manières possibles - totalement incapables. Ils préfèrent ainsi passer pour être, eux, des gentlemen ne pratiquant pas le chantage ou même pour des velléitaires n'ayant pas ....ce qu'il faut pour passer à l'acte.
Mais pourquoi donc ? Parce que leur choix réel et profond, depuis François Mitterrand, depuis Jacques Delors - comme l'explicitent enfin des chroniqueurs d'aujourd'hui (cf. http://www.observatoiredeleurope.com/Comment-la-gauche-francaise-a-permis-au-capital-de-jouir-sans-entrave_a2192.html ) - c'est bien l'Europe telle qu'elle existe, celle que les socialismes allemand puis français ayant renoncé à l'économie mixte (même la SNCF va être bradée), le capitalisme international servi par Jean Monnet et la doctrine ordo libérale assaisonnée de naïve mystique supra nationale se sont unis pour fabriquer selon un modèle illusoire croyant pouvoir dissoudre des nations ne partageant pourtant pas la même langue et donc ni les mêmes facultés, ni les mêmes intérêts.
Le nôtre aujourd'hui, comme au jour de l'entrée de la Grande Bretagne dans le marché commun ( et dans la même grande inconscience d'un peuple français, qui n'alla pas voter au référendum pompidolien de l'époque) , est, une fois de plus, battu en brèche par l'alliance des libéraux allemands et anglais et grâce à l'inertie de nos pouvoirs incapables d'allumer, comme l'insolence stratégique d'un Cameron sait le faire, les feux qui seraient nécessaires... mais pour faire évoluer les choses dans un sens contraire au sien.