Ouf !
Le candidat du Pati Socialiste l’a emporté face à la candidate du FN ! Frédéric Barbier a obtenu 51,43 % des suffrages exprimés contre 48,57 % à Sophie Montel. 15 504 voix contre 14 64 : une différence de 863 voix.
Le FN était pourtant arrivé en tête au 1er tour avec 32,6 % des suffrages exprimés, alors que le PS plafonnait à 28,8 % et que le candidat de l’UMP était éliminé avec 26,5 %.
Entre les deux tours, la participation a augmenté de 9,5 points, de 39,56 % des inscrits à 49,07 %) et 6 403 électeurs supplémentaires ont voté le 8 février.
Frédéric Barbier a gagné 8 088 voix et progresse de 22,6 points. Il a sans doute bénéficié du report d’une bonne partie des voix du FdG, de EELV et dans une moindre mesure de LO, malgré le silence assourdissant de Jean-Luc Mélenchon et le refus de LO d’appeler à battre le FN. Il a bénéficié également du report d’environ 1/3 des voix qui s’étaient porté sur le candidat UMP au 1er tour et de l’apport d’une partie des voix des électeurs qui n’avaient pas voté lors de ce 1er tour.
Mais le regain de mobilisation n’a pas profité qu’au candidat du PS. Sophie Montel, progresse, elle-aussi, même si c’est dans une moindre mesure, de 16 points et de 6 269 voix ! C’est extrêmement dangereux : le FN a maintenant des réserves pour les seconds tours.
La bipolarisation de la vie politique
Dans un entretien accordé au Monde du 28 mars 2014, au lendemain du 1er tour des Municipales, Marine Le Pen avait indiqué clairement le but et les moyens de sa stratégie de conquête du pouvoir : « On passe par une tripolarisation de la vie politique française. Or, sauf à passer à une VIème République, la Vème va imposer à nouveau une bipolarisation, c’est la logique des institutions. Cela se fera entre l’UMPS d’un côté et le Front National -Rassemblement Bleu Marine de l’autre ».
Nous étions, nous sommes prévenus.
L’ « effet 11 janvier » n’a pas pesé très lourd
L’ « Union nationale » réalisée lors des 10 et 11 janvier n’aura pas duré très longtemps. L’ « effet 11 janvier » aura sans doute pesé dans le résultat du second tour mais cela n’a pas empêché une bonne partie des électeurs de l’UMP de voter pour le FN (sans doute la moitié), de s’abstenir ou de voter blanc (les bulletins blancs et nuls ont augmenté de 5,5 points (2 000 bulletins) entre les deux tours.
Oui, il y a le feu au lac !
Jean-Christophe Cambadélis a raison d’affirmer : « Il y a le feu au lac !» mais encore ne faut-il pas se tromper de lac. Cambadélis accuse la désunion de la gauche mais, ce qui divise avant tout la gauche, aujourd’hui, c’est la politique du gouvernement de Manuel Valls. Il n’est pas possible d’unir la gauche derrière une politique qui tourne le dos aux « 60 engagements de François Hollande » et va au devant des souhaits du Medef et de la Commission européenne.
Donnant, lui aussi, dans l’image aquatique, Manuel Valls affirme « Le FN représente un véritable danger, surtout quand, en face, la digue n’est pas suffisamment solide … » Sans doute découvre-t-il que la porosité entre l’électorat de l’UMP et du FN est, aujourd’hui, largement dépassée et que depuis bien longtemps les digues n’existent plus ?
Claude Bartelone souligne que « La gauche n’a pas vocation à être le spectateur ou le commentateur de la marche de l’extrême-droite vers le pouvoir » C’est , malheureusement, ce qu’elle fait en se retranchant derrière des principes abstraits tels les « valeurs de la République » alors que depuis 2012, l’une des valeurs essentielles de la République, l’égalité ne fait que reculer sous les coups de boutoirs de la hausse du chômage, de la précarité, de la pauvreté, de la démolition des droits sociaux.
A écouter ces trois éminentes personnalités rejeter les responsabilités de la situation politique actuelle sur le FdG, EELV ou l’UMP, on ne peut que se poser la question : mais qui détient le pouvoir aujourd’hui, qui est aux manettes, qui peut faire changer concrètement la situation politique, économique et sociale ?
La clé du problème : un gouvernement de gauche qui mène une politique de gauche ;
Jean-Christophe Cambadélis a raison d’insister « Pour 2017, le danger demeure, non pas d’un 21 avril inversé, mais d’un 21 avril aggravé ». Si la gauche au pouvoir ne mène pas une politique de gauche, elle ne pourra pas mobiliser les électeurs de gauche qui s’abstiennent massivement et empêcher la droite ou l’extrême-droite de l’emporter en 2017. Les électeurs ne croient que ce qu’ils voient !
Manuel Valls, Claude Bartelone et Jean-Christophe Cambadélis auraient donc tout intérêt à méditer ces propos d’un électeur de Frédéric Barbier (rapportés par Libération du 8 février) : « Je ne me suis pas déplacé la semaine dernière parce que les politiques me dégoûtent de plus en plus. Aujourd’hui, je suis là pour faire barrage au FN. Mais la gauche devrait faire attention… Si elle continue à mener une politique de droite et à oublier ses électeurs, la prochaine, je reste chez moi. Et je ne pense pas être le seul dans cet état d’esprit ».
JJ Chavigne la lettre hebdo de D&S