Finalement, mieux vaut commencer par la fin. Je suis libanais et français. Français et libanais. ça implique d’avoir 50% de l’un et 50% de l’autre. Ou bien 50% de l’autre et 50% de l’un. Je suis un peu perdu dans qui vient avant.
Ma mère m’a toujours dit que lorsque je suis venu au monde j’étais libanais puis naturalisé. Personnellement, ça ne me change pas grand chose. Tout ce que je retiens c’est que j’ai le cul entre deux chaises.
Si nous regardons l’Histoire de ma famille, je suis plutôt 100% libanais et 0% français. Si nous regardons mon histoire, je suis plutôt 100% français et 0% libanais.
J’ai les cheveux frisés, ça m’a valu des mains indésirables. J’ai la peau blanche, ça m’a valu d’éviter des commentaires non désirés. J’ai un accent quand je parle libanais et j’ai des mots qui ne me viennent pas en français.
Je ne comprends pas mon peuple et je n’adhère pas aux valeurs de l’autre. Allez savoir qui est qui. Je crois que je ne peux pas trop vous aider pour le coup.
Finalement, mieux valait commencer par le début. Tout décortiquer. Se rendre compte que je suis déraciné.
Est-ce qu’un arbre pousse lorsqu’il est déraciné dès le plus jeune âge ? Est-ce qu’un arbre s’épanouit lorsqu’il est coupé de sa Terre ?
Au bout d’un moment, je fatigue. Alors j’essaie de me rattacher à ce que je peux.
Finalement, je ne suis pas un arbre, ai-je vraiment besoin de racines ? Finalement, j’ai quand même un orteil dans l’un, un orteil dans l’autre. Ne me demandez pas comment je fais, je ne sais pas. C’est de l’acrobatie. C’est de la douleur. C’est n’être ancré dans aucun des deux.
Je suis constitué de souvenirs. Je vacille entre la mélancolie et l’euphorie.
Mélancolie des sensations que je ne connaitrais sans doute plus. Euphorie de les avoir éprouvées au moins une fois dans ma vie.
Ma vie entre ces deux rives.