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Billet de blog 28 mai 2025

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Sexophobie. Pornographie, pénétration, plaisir ou les trois péchés d’aujourd’hui

Et si la liberté sexuelle n’était plus qu’un souvenir ? Sous prétexte de protection, un nouveau puritanisme infiltre nos institutions, nos écrans, nos discours. La pornographie devient suspecte, la sexualité active culpabilisante, la pénétration un tabou.

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Illustration 1

Un ordre supranational vient de décréter que la sexualité telle qu’elle était vécue jusqu’ici relève désormais de la perversion, de l’abus, d’une incompréhension fondamentale du sens même du sexuel. Des siècles d’histoire se retrouvent brusquement ramenés au rang de vices. Nos sociétés, sous l'emprise d’un puritanisme latent, glissent vers une sexophobie assumée. Dans cette société faussement ouverte, la sexualité est progressivement reléguée à la sphère privée. Elle se soumet à une normalisation et une médicalisation croissantes, imposant des interactions toujours plus aseptisées. Ce mouvement induit une inversion des normes, érigeant en modèle idéal une sexualité sans pénétration, voire sans sexualité du tout, seule à même d’échapper aux nouvelles injonctions sociales. Ce glissement stigmatise implicitement toute activité sexuelle. Les médias participent activement à cette dynamique, relayant sans nuance des discours de professionnels de la santé mentale prompts à défendre une sexualité édulcorée et dépourvue de toute aspérité.

« Pas de pornographie », « pas de pénétration », « pas de gros mots », « interdictions partout », « contrôle omniprésent ». Si durant des siècles l’argument « protéger les femmes » a servi à les écarter d’une sexualité libre et assumée, aujourd’hui, sous couvert de « l’intérêt supérieur des enfants », se dessine une volonté renouvelée de censurer et contrôler la sexualité adulte. En censurant la pornographie au nom des enfants, ce sont pourtant bien les adultes que l’on risque de criminaliser. Interdire la pornographie ? Certainement pas. Regarder de la pornographie n’est ni un crime, ni une déviance, ni une addiction. C’est une liberté individuelle essentielle à préserver face aux ingérences moralisatrices ou politiques. Bannir la pénétration ? Selon quel nouveau code moral devrions-nous soudain l’exclure ? La pénétration n’est pas violence, elle n’est pas domination systématique et c’est méconnaître profondément les nuances de la sexualité humaine. 

Aujourd’hui, les rituels de séduction dans la rue s’effacent, les démonstrations d’affection publiques se raréfient. Les discothèques, jadis lieux privilégiés de drague, deviennent des espaces aseptisés où les interactions ne reposent plus sur l’érotisme. Ce glissement vers une intimité contrôlée, encouragé par l’émergence d'un ordre moral lié aux nouveaux médias, donne naissance à des pratiques sexuelles sans contact physique direct : cybersexe, sexe téléphonique, rencontres virtuelles via des applications. 

À quand la fermeture des saunas ? La dissolution des clubs échangistes ? La pénalisation pure et simple des pratiques BDSM ?

Ainsi, derrière le masque d’une libération, surgit une sexualité paradoxale : hyperconnectée mais privée de contact, omniprésente mais dématérialisée, symbole d’une époque qui redoute le corps autant qu’elle le sacralise.

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