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Billet de blog 26 avril 2022

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Un point d'étape sur les conditions d'une coalition des gauches aux législatives

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Point coalition aux législatives. Ce matin, Jadot déclare donc sur Inter qu'un accord EELV-UP, ce sera, je cite, « sans lui ». Et l'on apprend également que, si Sandrine Rousseau risque d'être exclue de la liste des candidats EELV aux législatives à Paris, ce sera du fait non de LFI, mais de son propre parti après qu'elle a contesté la ligne de Jadot. Bien plus, Sandrine Rousseau s'interroge sur la volonté de la direction d'aller vers une coalition aux législatives :

« « Nous avons demandé à ce que des personnes qui font partie de la mouvance de Sandrine Rousseau soient inclues dans les négociations, mais il n’y a pas de volonté de la direction de prendre en compte cette dynamique radicale, à gauche et hors du parti qui a éclos durant la primaire des écologistes, témoigne l'élue de Paris Alice Coffin, ex-directrice de campagne de Sandrine Rousseau. On reste figé dans une composition du parti fixé par le congrès d’il y a deux ans. »

L’aile gauche d'EELV, réunie dans la motion « Le Souffle », avait aussi demandé à être représentée dans les négociations. C’était l’objet d’une contribution écrite envoyée au Conseil fédéral du 16 avril, qui s’appuyait sur l’analyse de « l’impasse » stratégique de la campagne de Yannick Jadot (qui n’a obtenu que 4,6 % des voix le 10 avril). « Comment imaginer qu’une discussion apaisée et responsable puisse s’enclencher avec nos partenaires si ce sont les mêmes aux manettes ? », interrogeait la motion.

« EELV a mis dans l’équipe de négociation des gens historiquement opposés à LFI, c’est quand même étrange », remarque Sandrine Rousseau, citant l’ancien responsable des élections à EELV Bruno Bernard, et l’actuelle déléguée aux élections d’EELV, Hélène Hardy. Cette dernière avait mis son véto à tout accord avec LFI aux régionales en Paca en 2021. « Je doute parfois de la volonté de la direction d’arriver à un accord », ajoute Sandrine Rousseau. »

Il faut également revenir sur les tensions au PS. On le sait, des hiérarques du PS dont, notamment, Hollande, Delga, Aubry et Hidalgo, et ce, avant même le premier tour (ils avaient donc anticipé la défaite d'Hidalgo et se fichaient comme une guigne de la campagne, sauf pour taper plus sur Mélenchon que Macron et le Pen) avaient organisé un dîner confidentiel, visant à dynamiter le PS, et fonder une aile "gauche" de la macronie.

On comprend dès lors mieux qu'Olivier Faure (qui n'était pas convié à ce dîner — quelle élégance vis-à-vis d'un premier secrétaire qui, quoi qu'on en pense, avait été désigné par les militants !) se soit donc jeté dans les négociations. C'est évidemment une manière de se sauver, lui et l'appareil, et de rendre un coup à ces putchistes à la petite semaine. Du reste, Le Foll, proche de Hollande s'il en est, confirme cette ligne antagoniste à tout projet de coalition, en déclarant ce matin sur Public Sénat : « Ce parti (le PS) est mort ». Et plus encore : « Soit on se lepénise, soit on se mélenchonise ou soit on se macronise. Ni l'un, ni l'autre, ni l'autre. ».

Je ne reviendrai pas sur la réécriture d'une histoire plus ancienne qui voudrait que ce soit LFI et Mélenchon qui ont été des obstacles, et les seuls obstacles à un accord. Je me contenterai de rappeler que dès janvier 2017, le PCF se refusait à tout accord clair avec LFI aux législatives (et que, pour le moins ambigu sinon opportuniste, il nouera des accords avec le PS, mais apposera au contraire des logos Front de Gauche sur certaines affiches dans d'autres circonscriptions). Que le congrès du PCF de 2018 désignant Fabien Roussel avait déjà acté, selon une ligne identitaire, la nécessité pour lui de présenter un candidat aux présidentielles. Qu'enfin EELV avait fait de même après avoir conclu à l'échec du retrait de Jadot au profit de Hamon en 2017. Les responsabilités auront donc pour le moins, et pour le dire cordialement, été partagées.

Quant à ceux qui déclarent aujourd'hui qu'une coalition ne saurait remporter les législatives, ils commettent la même erreur qu'à la présidentielle. Tout d'abord, le très bon score de Mélenchon n'est pas le produit du seul vote utile. Comme l'a très justement fait remarquer Stefano Palombarini, si EELV, le PCF, le PC ont perdu 4 points par rapport aux projections, Mélenchon a lui gagné 11 points. Les gains de la campagne sont donc plutôt à chercher du côté des abstentionnistes, des jeunes et des classes populaires, très classiquement entrés plus tard que les autres dans la campagne.

Il me semble donc, pour finir, 1) qu'on ne peut donc plus dire, au regard de ces faits, passés et présents, que Mélenchon soit le seul et principal obstacle à la construction d'une coalition 2) que si l'on peut avoir des interrogations et des doutes sur le fonctionnement de la vie démocratique à l'intérieur de LFI (j'ai moi-même, avec nombre d'autres, exprimé publiquement ces interrogations et ces doutes, à l'égard du départ de Charlotte Girard ou du peu de respect, un temps, des positions de Clémentine Autain), la vie démocratique à l'intérieur du PS et d'EELV n'a rien de plus enviable 3) que ceux qui nous disent qu'une victoire de cette coalition serait impossible ne le déclarent que pour s'interdire de la rendre possible, comme ils avaient déclaré impossible une victoire, pourtant possible, de JLM au premier tour (du reste, les mêmes qui déclarent toute victoire impossible en se fiant aux derniers sondages, auraient été les mêmes qui déclaraient impossible la victoire de la coalition de gauche plurielle en 1997, qui n'était pas mieux placée en début de campagne dans les premiers sondages du printemps 1997) 4) que si cette victoire est possible, elle sera de toute façon le fait non, de hiérarques et d'appareils en retard sur la société, mais d'une dynamique sociale de mobilisation des classes populaires, des jeunes, des populations racisées, qui ont besoin d'une victoire après tant d'années d'humiliation et de précarisation. Et si ce n'est de gagner cette législative, de s'organiser durablement pour s'opposer à la violence des réformes que nous prépare Macron, et réunir les conditions d'une victoire dans 5 ans.
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NB : Les principales sources invoquées ici:  pour ce qui concerne EELV et le PS, un article de Mediapart et l'autre du Monde.

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