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Billet de blog 1 mai 2020

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Céliane est sortie ce 1er mai déposer des masques cousus maison pour Montreuil. Alors qu'elle fait la queue devant une épicerie en bas de chez elle, elle dépasse de 15 minutes son heure de sortie, elle se fait verbaliser. Témoignage

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Je suis sortie en ce 1er mai, déposer des masques cousus à la maison pour le réseau de Montreuil. Sur le retour, je m’arrête rue de l’Église où il y a quelques manifestants. Ceux qui ont des pancartes, même s’ils sont dans la queue de l’épicerie se font contrôler, voire virer. De mon côté je filme.

Je suis à 200m de chez moi. Je croise un ami. Je fais la queue devant l’épicerie. Un flic vient me demander pourquoi je filme. Je lui dis : « Pourquoi pas ? » Il me demande si c’est pour les réseaux sociaux. Je dis que non. Il me contrôle.

 J’ai dépassé mon heure de sortie de 15 min. Il me met une amende et me dit que je suis bien trop loin de chez moi. Je ne comprends pas, j’habite à côté du commissariat 200m plus haut.

 Il me dit que seule l’adresse sur la carte d’identité compte. Le reste ne vaut rien. Et que si je n’ai pas accès à l’ancienne adresse (dans le 18ème) c’est MON problème.

Je lui dis qu’on n’est pas obligés de changer son adresse sur sa carte d’identité. Il prétend le contraire et me dit : « Comme ça votre amende sera très vite majorée à 400€ ». J’ai la haine. C’est mon tour à l’épicerie, je sais même plus de quoi j’avais besoin. Un ami me prend quelques courses, moi je suis perdue.

On rentre. J’ai la haine alors je parle fort. Parce que ça fait plus de deux semaines que je couds bénévolement des masques. Que j’aide aussi mon voisinage autant que possible. Je suis fatiguée.

Un flic sur sa moto se moque de moi et dit : « Oh là là j’ai le seum ». Je me retourne. J’hallucine. Mon ami m’arrête et me dit « Laisse, on y va ». Je fonds en larmes. Et d’autres flics se moquent. J’entends : « Tu vois les jeunes xxxx se mettent à pleurer après ».

 J’ai la haine. J’ai la haine. 135, peut-être majorée à 400. Alors qu’à côté de ça je travaille encore plus que d’habitude sans aucune rémunération pour les réseaux de solidarités (ce même réseau qui a cousu au début quelques masques pour les flics !)  Ils ont tous les droits. Ils humilient sans honte. Et encore, je suis une chanceuse dans l’histoire car je n’ai eu qu’une amende. Mais j’ai la haine.

Céliane SV, 24 ans, membre du collectif Gilets jaunes Enseignement Recherche

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