Pour qui veut regarder la réalité en face, les faibles résultats du Front de Gauche lors de ces élections cantonales sont tristement révélateurs d'une situation annonciatrice de graves déconvenues.
Non seulement le résultat est fort loin du succès à deux chiffres annoncé à cor et à cris par Mélenchon qui imaginait que le Front de Gauche aurait pu approcher le résultat du PS et même arriver devant lui dans plusieurs cantons, mais les quelques 9% obtenus par le Front de Gauche sont à comparer au dernier résultat obtenu par le PCF lors des précédentes cantonales alors qu'il se présentait seul: 8,77%!
Pour peu qu'on se souvienne du différentiel de l'abstentionnisme entre ces deux élections ( près de 20 points de plus en 2011!) la progression en pourcentage, si l'on ose dire, correspond bel et bien à une perte en nombre de voix!
Dans ces conditions, on peut comprendre la mauvaise humeur du co-président du PG refusant de se rendre au rendez-vous de la péniche d'une ex gauche plurielle électoralement insubmersible, en lâchant au passage - ce qui n'améliore pas le résultat du FdG - qu'il ne viendrait pas " parce que nos amis du NPA" nous ont soutenu dans 18 circonscriptions et n'ont pas été invités!
Finalement et tous comptes faits, au premier tour le Front de Gauche n'a strictement rien rapporté au PCF en nombre de voix, et les stratèges de la place du Colonel Fabien voient se confirmer leurs soupçons: le Front de Gauche est bel et bien une auberge espagnole, où l'on ne trouvait jadis à manger que ce que l'on avait pris soin d'amener avec soi. Le PCF trouve pour l'essentiel les militants et les électeurs qu'il a apportés, commence à remarquer que ça sent le brûlé, et comme si ça ne suffisait pas, constate que Mélenchon a mis au menu deux plats qu'il ne digère pas, mais alors pas du tout: l'arrêt du nucléaire, et l'intervention en Lybie.
Là ce n'est plus un avertissement d'incendie, c'est carrément le feu au lac: le PCF est tout aussi nucléocrates que l'UMP et le PS avec lesquels il partage le mythe d'une l'indépendance énergétique française: rien de nouveau dans ces positions bien connues auxquelles il tient mordicus avec pour seule particularité l'argument que le nucléaire ne doit pas être confié au privé, comme c'est le cas au Japon!
C'est qu'il faudrait plus que la catastrophe de Fukushima pour réveiller le PCF de son sommeil dogmatique dans ce domaine ultra-sensible, et assurément bien plus que le peu d'influence concédée à Mélenchon, de plus désormais flanqué d'une co-présidente radicalement anti-nucléaire, Martine Billard, caution écologiste indispensable au récent enracinement du PG dans son socle "vert".
Quant à l'intervention en Lybie, le silence des dirigeants du PCF sur ce point est impressionnant, sans rien dire de l'hostilité ouverte de militants radicalement anti-guerre et qui ne sont pas près d'admettre une intervention militaire pilotée par les USA et pour comble en Afrique du Nord!
Autant dire que les semaines à venir vont être riches en rebondissement, et que les chances de Mélenchon d'être le candidat choisi par le PCF viennent de se réduire drastiquement.
D'autant qu'une option redoutable reste ouverte pour le PCF, dont on connaot la capacité à encourager les bonnes volontés pour mieux les lâcher en rase campagne comme ce fut le cas pour José Bové: celle de renoncer à présenter un candidat communiste aux présidentielles, en retour d'un remerciement comptant aux législatives de 2012: un gambit, en somme, comme disent les jouers d'échecs, c'est à dire le sacrifice délibéré d'un pion pour en tirer le plus grand bénéfice!
Retrouver enfin une forte représentation à l'Assemblée Nationale et au Sénat, un rêve encore hier inaccessible mais qui deviendrait envisageable tant le PS serait prêt à payer cher pour obtenir un vote utile au premier tour;
Un premier tour des présidentielles sans candidature communiste? Impensable? Hier encore, sans doute, mais aujourd'hui, avec la menace d'un front National proche des 20 %, le PCF trouverait une excellente raison de renoncer au profit de la lutte nécessaire contre cette extrême droite de plus en plus menaçante, à une élection qui ne lui réussit pas.
On n'a pas fini de mesurer les effets et les conséquences possibles de cette impressionante montée du vote frontiste.