Dans un article récent de la revue en ligne AOC :Imaginer les gestes-barrières contre le retour à la production d’avant-crise ; Bruno Latour remarque cette chose stupéfiante : » La preuve est faite, il est possible de suspendre partout dans le monde et au même moment le système économique »
Mais nous dit-on,cela a un coût, la dette explose , cette dette qui est la somme de tout ce que les pauvres doivent aux riches,
Et pourtant pour beaucoup d'entre nous, en tous les cas pour ceux qui ne sont pas les premières victimes des inégalités sociales, le confinement s'est bien passé, nos besoins élémentaires, au premier chef notre santé bien sûr mais aussi nos besoins alimentaires ont été satisfaits. Pendant toute cette période une économie utile , utilisant les infrastructures du pays, électricité , eau , ravitaillement en tous genres , transports routiers , chemin de fer etc.. .a parfaitement fonctionné grâce à une armée de petites mains que d'aucuns ont appelé en paraphrasant notre président : Les premiers de corvée,
Reste la catastrophe, la société de consommation s'est brutalement arrêtée , l'innovation est à l'arrêt , les nouveaux produits, les nouvelles machines , les nouvelles idées, tout s'est arrêté. Il faut remettre la France au travail, le confinement n'a que trop duré, la dette explose...
Il est encore trop tôt pour mesurer ce que nous avons perdu mais on voit déjà ce que le ralentissement de l'économie nous a apporté , un air, une eau, un ciel dégagés , il n'a fallu que quelques jours pour entendre de nouveau les oiseaux et voir les étoiles. Les eaux de Venise sont devenues transparentes.
Oui, mais voilà nous ressasse le gouvernement et ses affidés dans les médias : Regarder la courbe du chômage! Et de fait, comment pourrions nous vivre sans salaire ; beaucoup d'entre nous risque de passer au dessous du minimum vital et bien pire nous disent-ils :comment les pauvres feront pour rembourser leurs dettes.
La boucle est bouclée, la dette est perpétuelle , elle est irremboursable ; la dette c'est l'esclavage. Seuls ceux qui la maîtrisent, les banques, les fonds de pension décident où ils mèneront l'humanité car ils ont seuls le pouvoir de créer de l'emploi. Seuls ils décident de la façon dont nous devons les rembourser. Peu importe les nuisances , l'utilité plus que relative de leurs produits du moment qu'ils ont de la valeur sur le marché. Tout le reste, la santé, l'éducation, les infrastructures dont pourtant ils se servent abondamment sont des coûts. Nous, endettés jusqu'à la fin du monde, nous devons travailler et consommer.
La fin du monde, le réchauffement climatique veux-je dire ; croyez-vous qu'ils n'y ont pas pensé. Bien sûr que si répond sans ambages Bruno Latour « Ceux qu'il faut désormais appeler les élites obscurcissantes ont compris que s'ils voulaient survivre à leur aise, il ne fallait plus faire semblant, même en rêve, de partager la terre avec le reste du monde » (Où atterrir p.31) et plus tard dans le même article de la revue AOC du 30 mars 2020 :Ils veulent « se défaire du reste de l'Etat-Providence, du filet de sécurité des plus pauvres, de ce qui demeure encore des réglementations contre la pollution et, plus cyniquement, de se débarrasser de tous ces gens surnuméraires qui encombrent la planète »
Emmanuel Macron, avec l'aimable complicité de la commission européenne, Boris Johnson, Donald Trump et Bolsanaro , ces dirigeants dont nous sommes en droit d'interroger la légitimité démocratique sont les porte- paroles de cette élite. Car quoi qu'ils disent le confinement s'est imposé à eux, ils n'en voulaient pas et la folle impréparation de notre pays ne s'explique que pour cette raison là. Le monde globalisé est leur seul horizon et le virus qui malheureusement risque de ne pas être le dernier n'est qu'un caillou dans leur chaussure.
Nous devons ouvrir les yeux devant cette réalité, comprendre avec Bruno Latour que le Global n'est pas le Terrestre ; « cette minuscule zone de quelques kilomètres d'épaisseur entre l'atmosphère et les roches mères » (Où atterrir p.101 ) Cette zone critique est une fine pellicule où la vie à modifier radicalement l'atmosphère et la géologie.
Nous devons, nous aussi changer radicalement : les choix de production et les moyens à mettre en œuvre pour y parvenir ne doivent plus être imposés par quelques uns sous le joug de la dette mais dépendre de décisions démocratiques. Les entreprises doivent devenir citoyennes et responsables. Cette révolution est encore plus vitale pour nous que ne le fût celle des droits de l'homme au dix-huitième siècle, comme elle, elle nous permettra de reprendre notre destin en main.
Nous n'avons pas d'autres problèmes