MALI. Les enjeux du soutien militaire français
Face à l'occupation du nord-Mali par les islamistes, l'option militaire semble désormais inéluctable. Tout comme l'appui des forces françaises.
Pourquoi cette intervention ?
Dans la foulée du coup d'Etat qui avait renversé en mars le président Touré, tout le nord du Mali est passé aux mains d'islamistes alliés à la branche maghrébine d'Al-Qaïda. Ces groupes armés ont imposé une stricte application de la charia. Des exactions et brimades notamment dénoncées par Amnesty International : exécution d'un couple non marié, amputations de présumés voleurs, flagellations de buveurs d'alcool ou de fumeurs, arrestations de femmes non voilées… Les islamistes d'Ansar Dine ont également détruit la des mausolées de Tombouctou, classés au patrimoine mondial de l'humanité.
Outre la répression, on reproche aussi à Ansar Dine de s'allier avec les trafiquants et de terroristes étrangers dans la sous-région.
Pour le Premier ministre malien, le temps "presse" : "Plus nous prenons du temps, plus [les terroristes] ont l'opportunité de faire des dégâts, de s'enraciner, de peaufiner leur stratégie (…) plus ils ont le temps de cibler d'autres endroits et d'exporter le problème ailleurs."
Du point de vue de la France, il s'agit d'éviter l'enracinement du terrorisme et du "business" de la prise d'otages dans la zone et d'"éviter par tous les moyens que cette partie du Mali devienne un Sahélistan", selon les mots du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian.

Création du premier régime wahhabite
Après la disparition du Califat en 1924, la conquête du pouvoir en 1932 et l'exploitation des gisements pétrolifères d'Arabie à partir de mars 1938, la famille des Saoud et le wahhabisme prennent leur essor suite au pacte « pétrole contre protection » qui est conclu sur le croiseur USS Quincy le 14 février 1945 entre le roi Abdelaziz ben Abderrahman ben Fayçal Al Saoud et le président des États-Unis, Franklin Delano Roosevelt3. Ce pacte permet la protection militaire du régime wahhabite des saouds par les Etats Unis en échange du pétrole. Ainsi, le wahhabisme se développe avec l'apport des pétrodollars et la protection militaire des États-Unis. Ce mouvement se propage alors à l’extérieur du royaume via les médias (télévision, ouvrages, radio cassettes et sites internet)4.
Quand la CIA finançait les Frères musulmans
Les services secrets américains ont longtemps soutenu la confrérie, née en 1928 en Égypte.
Le fonds E 4320, conservé aux archives fédérales à Berne, concerne Saïd Ramadan, le gendre d'Hassan el-Banna, fondateur des Frères musulmans égyptiens. Poursuivi par le régime nassérien, réfugié en Suisse en 1959, Saïd Ramadan a créé le Centre islamique de Genève, le premier institut de ce genre en Europe. Il est par ailleurs l'un des fondateurs de la Ligue islamique mondiale inspirée par les Saoudiens. Une note confidentielle des services secrets suisses datant du 17 août 1966 évoque la "sympathie" de la BUPO, la police fédérale sur la protection de l'État, pour Saïd Ramadan. Elle ajoute : "Il est très certainement en excellents termes avec les Anglais et les Américains."
Un autre document, daté du 5 juillet 1967, se montre encore plus précis. Saïd Ramadan est présenté comme un "agent d'information des Anglais et des Américains. De plus, je crois savoir qu'il a rendu des services - sur le plan d'informations - à la BUPO." Toujours est-il qu'une réunion, présidée par le chef du service du Ministère public fédéral, du 3 juillet 1967, décide d'accorder un permis de séjour à Saïd Ramadan, alors que ce dernier aurait dû être expulsé le 31 janvier 1967. Les raisons de cette tolérance ? La possibilité "que les amis de Saïd Ramadan prennent le pouvoir dans les mois à venir dans l'un ou l'autre État aujourd'hui qualifié de progressiste ou socialiste".