Après un biopic sur Gainsbourg qui révélait une certaine méticulosité, Johan Sfar revient au cinéma la Dame dans l’auto avec des lunettes et un fusil, tiré d’un roman de Japrisot (déjà adapté dans des années 70 par le russe Anatoe Litvak, avec Marlène Jobert et Oliver Reed).
Dany (Freya Mavor), est la super secrétaire de Michel Caravaille (Benjamin Biolay), homme d’affaires à l’air ombrageux dont elle est secrètement amoureuse. Aussi quand il lui demande de venir un vendredi soir terminer un travail chez lui, elle fantasme déjà presque … même si finalement elle finit le lendemain matin par l’emmener à l’aéroport lui et … sa femme Anita ( Stacy Martin) pour un weekend en amoureux. Sans doute choquée par tant de goujaterie, la jeune femme décide de ne pas ramener immédiatement la voiture et de traverser la France pour aller voir la mer qu’elle n’a jamais vue !
Seul le titre du film est vraiment très beau : il évoque d’emblée le mystère et la dénonciation. Dany est-elle une femme qui découvre la liberté, se venge du machisme masculin (comme Marion Crane dans Psychose) ou est-elle juste cinglée ? Qui la précède ? Qui la surveille ? Qui est-elle ? Flash-back, superpositions d’images, flash forward (image mentale qui annonce la suite…) brouillent les pistes. Sfar revendique les 70’S, une ambiance de giallo italien (sans sexe ni violence) qui emprunte des codes narratifs à Hitchcock (Psychose, Vertigo).
Mais Johan Sfar reste un clipper, obsédé par l’image graphique, aux dépens de la mise en scène. Dans ces cas-là le film repose d’abord sur les acteurs et leurs costumes. En homme d’affaires, Biolay est servi par son physique adipeux, qui donne une certaine épaisseur et donc puissance à son personnage. Freya Mayor varie entre deux genres : la petite poupée de son des années 60 tellement charmante un peu idiote et la fille des années 2015 venue de nulle part. Stacy Martin est évidemment superbe mais on ne la voit pas assez. Enfin, le séducteur est une erreur de casting.
Dans le genre mieux vaut voir Perversion Story de Lucio Fulci, plus tordu et moins propre ou Thelma et Louise. Mais on peut aussi aimer le style carte postale et cartoon d’un dessinateur qui apprend à faire du cinéma.
GG