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Billet de blog 8 août 2015

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Man Hunt de Fritz Lang : pour se libérer de la parano totalitaire

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Parmi les 11 sorties de cette semaine du 5 août 2015, on a deux films de Fritz Lang, Cape et Poignard (1946) et Man Hunt (1941, déjà ressorti en copie restaurée en février 2011).


75 ans après son tournage, Man Hunt reste un grand thriller politique, drôle et anti-parano, à montrer à tous les obsédés du complot, avec une héroïne magnifique  (Joan Bennet en fléchette de Cupidon), un nazi distingué incarné par Georges Stevens et un super-méchant, John Carradine (le père de David), inoubliable en tueur glacé à tête de fouine.

L’intrigue s’inspire d’une histoire légendaire qui circulait au milieu des années 30 alors que la menace nazie se faisait toujours plus pressante. Un jour de 1939, le Capitaine Thorndyke, anglais féru de chasse aux gros gibiers, arpente les Alpes Bavaroises, jusqu’à ce que tombe dans sa ligne de mire l’animal le plus dangereux de l’époque : Hitler en personne, debout sur la terrasse de son nid d’aigle à Berchtesgaden. Gentleman, le chasseur hésite car c’est d’abord un sport qu’il pratique, puis quand il se décide, il est trop tard. Arrêté, suspecté d’être un agent secret aux ordres de sa majesté, le Capitaine devient à son tour la bête à abattre pour les nazis. Une gigantesque chasse à l’homme en Europe s’engage.

Les nazis raffolaient des complots réels ou imaginaires le plus souvent, qui leur permettaient de justifier tous les massacres. Croire qu’il y a toujours une volonté cachée est un ressort de la paranoïa et l’une des dynamiques du pouvoir totalitaire. Aussi l’invraisemblable chasse de Thorndyke qui par hasard trouve Hitler dans son viseur est un affront à l’idéologie (« la logique d’une idée » selon Arendt). « L’invraisemblance est le privilège du réel » disait Genette ; or dans l’idéologie, le réel est toujours nié puisqu’il doit être fabriqué. Donc Thorndyke doit être éliminé.   

Pour lutter contre la puissante machine de renseignement nazi, Lang convoque, outre la sportivité de son héros, le charme de Joan Bennet et l’espièglerie d’un enfant ; L’humour et le jeu pour déjouer la méfiance et le complot : la lutte est inégale, mais le  combat politique n'est pas qu'affaire de force; il a une dimension morale et la lutte contre le mal est aussi une lutte mentale. Lang déjoue le manichéisme des gentils démocrates contre les méchants nazis et dénonce l’assujettissement de l’individu à un groupe. Méfiant envers toute forme d’organisation étatique ou parallèle –dont parfois les intérêts convergent (M. le Maudit)- le cinéaste exalte l’indépendance d’esprit et l’élégance contre la meute et la logique de commandement qui exonère l’homme de ses responsabilités. A voir et à revoir !!

GG 

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