Gloria Grahame (avatar)

Gloria Grahame

Abonné·e de Mediapart

41 Billets

0 Édition

Billet de blog 27 février 2014

Gloria Grahame (avatar)

Gloria Grahame

Abonné·e de Mediapart

La Femme du Ferrailleur: un voyage dans la Bosnie contemporaine

Gloria Grahame (avatar)

Gloria Grahame

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

« C’est la volonté de Dieu que les pauvres aient la vie dure ». En prononçant cette phrase, Nazif, le ferrailleur bosniaque, ressemble à Job dans la Bible qui, malgré les malheurs qui s’abattaient sur lui, refusa de s’en prendre à Dieu et accepta son sort comme une épreuve qui lui était imposée. Pourtant Nazif aurait de quoi se révolter, être en colère, non contre Dieu, mais contre un système dans lequel avoir de l’argent peut devenir une question de vie ou de mort : après une fausse couche, sa femme doit se faire opérer d’urgence mais aucun hôpital n’accepte de la prendre en charge car elle n’est pas assurée. Dans la Bosnie contemporaine, comme dans l’Amérique d’avant Obama, il n’existe pas de sécurité sociale universelle : aussi Nazif part-il à la recherche de cet argent qu’on lui demande pour sauver sa femme.  

Le réalisateur bosniaque Danis Tanovic le confesse : dans la même situation que son héros, il aurait sans doute pété les plombs et eut des envies de meurtre. C’est d’ailleurs parce qu’il a été impressionné à la lecture de  l’histoire vraie de Nazif et de sa femme Senada, qu’il a eu envie d’en faire un film ; impressionné par le courage et la force tranquille de ce ferrailleur rom, pauvre, pris dans une course contre la montre, contre l’injustice et la mort.   

Avec La Femme du ferrailleur, Denis Tanovic s’amuse à brouiller les frontières de la fiction et du documentaire, de l’imaginaire et du réel. Pour rester complètement fidèle à son histoire, il a demandé aux vrais protagonistes de jouer leur propre rôle. Tourné en neuf jours, avec une Canon numérique et des acteurs totalement amateurs, sans maquillage et intégralement en lumière naturelle, La femme du ferrailleur est un film qui aurait été impensable sans les nouvelles technologies numériques. En même temps que le film réactualise le vieil adage hollywoodien, à savoir que le cinéma, c’est d’abord et avant tout « a good story, a good story, a good story ».  Une caméra, une bonne histoire et …  « un instinct qu’on a ou qu’on  n’a pas » selon les mots de Tanovic, et grâce auquel on sait où mettre la caméra, caractériser un personnage au travers d’une parole, d’un geste, créer du suspens, etc…

De ce point de vue, en plus d’être un réquisitoire contre les injustices et les discriminations dont sont victimes les roms de Bosnie, La Femme du Ferrailleur est aussi une belle leçon de cinéma.  

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.