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En réunion de groupe militant, j'ai commencé à soutenir que si l'art ne pouvait pas changer une vie, alors il ne valait pas une heure de peine. Un collègue m'a répondu qu'il était tout à fait d'accord, et que pour là d'où il vient, l'art contemporain et la fondation LVMH de Bernard Arnault ne valent pas une augmentation de salaire.
Je crois que le collègue fait une erreur politique majeure en laissant l'art aux riches. Ma peinture n'est pas un privilège, je me suis payé le droit de me chercher parce que je travaillais. Je dois ma peinture aux beaux-arts de Wazemmes (école municipale de Lille), où j'ai eu mon premier cours de nu avec Roger Frezin, un artiste local. Aux collègues militants, je voudrais ici montrer que l'art contemporain qui semble une imposture, par exemple le monochrome, peut être pratiqué avec le sérieux d'un travail consciencieux, et faire réfléchir.

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La peinture ci-dessus est un monochrome, uniquement réalisé avec du blanc à plafond, sur une planchette A4. La croûte a été scannée, puis passée au “révélateur numérique”. À droite, le blanc travaillé par le peintre, à gauche, ce que le calcul révèle. Que les racistes se le disent, le blanc pur n'existe pas. Il y a des blancs jaunes, des blancs bleus, du lisse brillant plus clair que les crevasses. Avec un logiciel de traitement d'images, il suffit d'écarter le spectre capté par un scanner sur tout ce que peut voir un œil, pour découvrir du sombre et du clair, des couleurs, le monde caché de la peinture matérielle. Cet aspect est très facile, un clic peut suffire à écarter le pic clair dans l'histogramme. Il est plus long d'éduquer l'œil à repérer les nuances pour communiquer l'intention d'un dessin, et pas seulement les hasards de la matière.

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Un siècle avant, le carré blanc sur fond blanc de Malevich, exposé à Moscou, est une œuvre révolutionnaire, et pédagogique. Il ne s'agit pas d'un accident unique, c'est l'aboutissement d'une longue série commencée en 1900, à partir de tableaux impressionnistes. Petit à petit, le peintre a simplifié les formes, rationaliser les couleurs, pour chercher les éléments essentiels de l'image. En 1913, avec le carré noir sur fond blanc, il pose la peinture la plus plate, la surface sans épaisseur. En 1917, avec la révolution russe, l'artiste découvre l'espace pur, et infini, le blanc. Comme tout grand peintre, cette période lui a permis de reprendre les éléments de son art à la tradition, ces éléments sont aussi des bases pour enseigner un art nouveau, révolutionnaire.

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Un siècle après, pour moi au moins, je pense avoir refermé un siècle d'histoire de l'art, même le monochrome peut devenir figuratif. Il n'y a pas d'art abstrait. L'abstraction la plus pure est toujours une concrétion. Cette révolution dérisoire n'aura d'écho qu'ici, car ces images sont invendables. Les fichiers numériques sont indéfiniment copiables et valent assez peu sans leur commentaire. J'ai épuisé l'idée, je ne vais pas devenir toute ma vie commercial de moi-même et m'aliéner à ma propre marchandise. Impossible de décorer le cube blanc des galeries avec des peintures banches, il n'y a rien à vendre, et de toute façon, je ne suis pas invité, et je n'aime pas ce monde. La fondation de Bernard Arnault n'est qu'un procédé d'optimisation fiscale, elle peut disparaître et ne manquera pas à l'histoire, elle doit disparaître, car non seulement c'est une privatisation d'argent public, mais aussi de l'art.

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Ce qui est fait est fait, par contre, l'exercice mériterait d'être enseigné. Un jour peut-être, je me trouverais un job de prof d'art municipal, si on ne me demande pas un pedigree d'expositions. Les séances de blanc permettrait d'enrichir l'expression de sa matière, et mieux comprendre la couleur numérique.

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PS, le collègue a répondu.
Bon, j'ai lu ton blog camarade. Bravo pour ta détermination à me convaincre, mais c'est peine perdue, et ce dès les premières lignes malheureusement. Je reste convaincu que l'art de la peinture comme la sculpture.....n'a que le plaisir de distraire et de nourrir les appétits d'une élite, et ne changera jamais, en tant que spectateur, la vie des couches populaires qui ont d'autre chose dans la tête qu'un mélange de blancs.
Sans rancune camarade.
Note pratico-pratique
- Pour le support, préférer un panneau rigide à la taille de son scanner (A4 ou A3), le papier gondole et va faire des ombres non désirées, acheter en magasin de bricolage des panneaux de fibres composites ex : MDF de 3 à 6 mm, (faire découper sur place, le surcoût est un gain de temps et de précision).
- Peinture acrylique, pour commencer, le blanc à plafond est pas mal, très plâtreux, permet de gratter, de graver, puis ensuite tester d'autres blancs bas de gamme achetés supermarché, tester des textures (mat, brillant, pour bois ou métal...).
- Toutes sortes d'outils : pinceaux de bricolage, couteaux à peinture, grattoirs, bois taillés... chercher sa main.
- Même si on n'a pas encore son dessin, tout le monde peut explorer le vocabulaire des textures, par exemple autour d'une figure simple, comme une ligne d'horizon ou une bouteille.
- Un scanner qui enregistre en "16 bits" (comme le raw des appareil photo un peu pro), pour avoir de la nuance sur le pic de blanc, un espson v600 perfection (~300 €) suffit, un appareil photo sera moins précis et plus irrégulier (ombres et reflets de l'éclairage).
- Un logiciel qui traite les images en 16 bits, en gratuit, Gimp >= 2.9
- Jouer avec les courbes de couleurs.