M. Plenel,
Vous avez agité entre les 2 tours de l'élection présidentielle la menace du (comment disiez-vous déjà?) désastre. Ce désastre n'est pas advenu. Nous ne pouvons que nous en féliciter. Mais ce désastre pouvait-il advenir?
La réalité est que non. Pendant ces 2 semaines, les sondages, qui furent remarqueblement précis au premier tour, ne sont jamais descendus sous la barre des 58,5% d'intentions de vote. Même avec une marge d'erreur maximale de 5%, cela laissait encore un écart de 7 points (53,5 - 46,5), soit environ 2,8 millions d'électeur.
Malgré cette réalité, vous agitez la menace d' "un fort report de l’électorat de droite vers Le Pen et d’une forte mobilisation de celui d’extrême droite, associés à une démobilisation des électeurs de gauche, provoquée par la colère, la division ou la lassitude". Si la porosité d'une partie de l'électorat de droite est certaine, il est tout aussi acquis qu'une partie au moins aussi large de la droite est acquise aux valeurs républicaines et ne se résout pas à un votre d'extrême-droite, d'autant plus si le candidat d'en face n'est pas si loin d'un certain nombre de leurs valeurs.
Donc, soit vous fîtes une grossière erreur d'analyse, et je vous crois trop expérimenté pour commettre une telle erreur, soit vous poursuivez d'autres fins, M. Plenel.
Avez-vous oublié l'expérience de 2002? Avez-vous oublié ce qui a suivi: la reprise à leur compte des idées du FN par les partis de gouvernement (l'ex UMP puis le PS) et la montée inexorable du FN? Avez-vous pensé que les mêmes causes ne produiraient pas les mêmes effets?
Et pourtant, si vous nous avions suivi, M. Plenel, nous serions aujourd'hui dans la situation où seule l'extrême-droite pourrait s'affirmer comme force d'opposition. Situation que ni vous ni moi ne pouvons accepter.
Dois-je ajouter que l'arrivée de Le Pen au second tour était annoncé depuis des mois voire des années. Fallait-il attendre la campagne du second tour pour s'alarmer?
Fallait-il ignorer que la descente dans les sondages de Le Pen dans les derniers mois de campagne était inversement proportionnelle à la montée de Mélenchon dans ces mêmes sondages?
Pourquoi n'avez-vous pas fait appel à faire barrage au Front National dès le premier tour, M. Plenel, alors que cela devenait possible. Pourquoi n'avez vous pas appelé à voter pour le seul candidat de gauche en mesure d'accéder au second tour?
En vérité, le partisan du "Ni Ni", c'est vous, M. Plenel. Ni Le Pen, Ni Mélenchon. Ni l'extrême-droite, Ni la gauche.