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Billet de blog 10 mars 2023

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Guyane : trois enfants scolarisés à la rue avec leurs parents depuis plusieurs mois

Trois enfants dont un atteint de la drépanocytose, maladie génétique grave, vivent dans les rues de Cayenne avec leurs parents depuis trois mois. Plusieurs anomalies administratives allant à l'encontre de la loi française, les empêchent de débloquer leur situation.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Nos enfants ont deux amis : Platon (3 ans) et Colombe (4 ans). Leur grand frère King son a 12 ans, il aime rigoler, le foot, écrire des pièces de théâtre. Leurs parents Elizabeth et Shekinah sont également nos amis chers.

Ils sont à la rue depuis le 23 décembre 2022, ont erré à droite et à gauche, dormi sur des cartons.

Ils ont logé chez des amis solidaires mais la résidence était trop loin du collège et de l’école.

Illustration 1
© AG

Alors ils ont décidé de se rapprocher tant bien que mal et logent dans un abri insalubre sans toilettes, ni eau courante. C’est d’autant plus dangereux que le petit Platon est atteint de la drépanocytose.

Le pronostic de cette maladie génétique grave dépend du suivi et des conditions de vie. Elle peut toucher le cerveau, le cœur, les poumons, les reins. Elle se manifeste par des crises douloureuses des membres et de l’abdomen, imprévisibles et répétées. Un traitement quotidien est administré et les bonnes conditions de conservation du médicament sont très importantes. 

Le petit Platon, né à Cayenne, sur le territoire français bénéficie d’une prise en charge à 100 % par la sécurité sociale pendant dix ans. Le personnel médical qui l’accompagne insiste auprès des parents pour que l’environnement de l’enfant soit salubre et à l’abri de la poussière.

Forcés de quitter la République démocratique du Congo en urgence car menacés de mort par le régime de Kabila, ils arrivent sur le territoire Guyanais en 2018 et demandent l’asile politique. Elizabeth Adasa attend en vain (à l’adresse de la Croix-rouge) sa convocation à l’OFPRA pour l’entretien de demande d’asile. Mais le seul courrier qu’elle reçoit est directement un rejet de la demande d’asile avec pour motif le fait qu’elle ne se soit pas présentée à l’entretien. Entretien qu’elle ignorait puisqu’elle n’a jamais reçu le courrier. Problème de la Poste ? Manquement de la Croix-rouge ? Cela a valu à Madame Adasa d’être privée de son droit à la demande d’asile.

Suite à cela Shekinah Kalambayi et Elizabeth Adasa tentent en vain de déposer une demande de titre séjour « accompagnement d’un enfant malade » auprès de la préfecture. En effet, pour cette démarche ils doivent y retirer un dossier et le remplir afin de le faire examiner par l’OFII.

Les agents de la préfecture de Cayenne refusent d’enregistrer leur demande et de leur fournir ce dossier car Monsieur Adasa et Madame Kalambayi ne sont pas en possession d’un passeport.

Or, d’après la loi française l’absence de passeport n’est pas obligatoire pour cette démarche. Leurs permis de conduire et leurs cartes d’électeur comportant tous deux leurs photographies et précisant tout deux leur nationalité (Congo RDC) entrent dans la liste stipulée dans l’annexe 10 de l’article R 431-11 du code de l’entrée du séjour et des étrangers. Malgré la lettre de leur avocate rappelant la loi les agents de la préfecture s’acharnent à refuser l’enregistrement.

Ils se trouvent dans l’impossibilité d’obtenir un passeport du fait de l’absence de représentation consulaire de leur pays sur le territoire Guyanais. L’ambassade du Congo en France et l’ambassade du Congo en Belgique sont tout à fait d’accord pour leur en délivrer, mais leur situation administrative ne leur permet évidemment pas de se rendre là-bas.

La famille a déposé un recours au tribunal administratif afin que ce dernier reconnaisse leur droit à enregistrer leur demande de titre de séjour. Cette démarche prendra des mois, voire des années (le tribunal considère qu’il n’y a pas d’urgence puisqu’il s’agit d’une première demande). En attendant, ils ne peuvent pas bénéficier d’un logement ni ne peuvent travailler.

Que peuvent-ils donc faire ?

Les voilà donc à tenter de survivre. Tenter de garder le moral. Tenter de maintenir les enfants à l’école (King son est en 5e avec un bon niveau scolaire et de bons résultats.). Tenter de protéger la santé de Platon dont le développement est pour l’instant excellent mais qui reste très exposé du fait de sa drépanocytose. Tenter de se maintenir propre. Tenter de survivre avec trois enfants. Tenter de leur apporter la joie et la sérénité dont tout enfant a besoin pour grandir.

Jusqu’à quand ?

Nous citoyennes et citoyens refusons de ne pas porter assistance à cette famille qui ne demande qu’à être régularisée pour travailler, se loger et vivre correctement.

Nous demandons à Monsieur le préfet de Guyane, d’exiger auprès de ses services d’enregistrer les demandes de titre de séjour « accompagnement d’un enfant malade » de Monsieur Kalambayi et Madame Adasa de toute urgence.

Nous demandons aussi à Monsieur le préfet, d’exiger de ses services un hébergement en urgence pour la famille, non loin des établissements scolaires des enfants (centre-ville de Cayenne) afin qu’ils puissent être à l’abri en attendant que leur situation administrative se débloque.

Bien sûr, il ne s’agit pas d’un cas isolé, ce que nous voulons pour la famille Kalambayi, nous le voulons pour tous. Nous pensons que l’accueil des personnes étrangères sur notre territoire est une richesse. Au-delà de ce que nous pensons, nous voulons que le droit français et international soit respecté sur notre territoire, à savoir le respect de la convention de Genève (respect du droit des demandeurs d’asile) et le respect du droit des étrangers à déposer leurs demandes.

Vous pouvez signer la pétition adressée à Monsieur Thierry Queffelec, préfet de Guyane.

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