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Durant cette période de circulation du virus, et de vache maigre en ce qui concerne la programmation en salles, le nouveau film de Christopher Nolan, Tenet, est perçu comme le messie que ce soit pour les exploitants ou pour les cinéphiles en manque de confiseries visuelles. Ce contexte est-il suffisant pour laisser son esprit critique dans sa poche et oublier les scories habituels du cinéma de Nolan, ici présents parfois jusqu’à la caricature?
Comme le supposait la bande annonce, Le dernier film de Nolan s’inscrit bien dans le sillon d’Inception. Film à concept, dit « cérébral » et empruntant ses codes au film de braquage. A la différence que Tenet semble s’engouffrer dans un concept qu’il maîtrise rarement. Les explications et indices quant aux mystères du film se succèdent à une vitesse folle via des ellipses qui ne laissent pas le temps au spectateur de souffler et d’assimiler ce qui vient d’être dit, se retrouvant de nouveau bombardé d’informations, ce qui a pour effet de voir tous les acteurs se mettre à parler comme des pages Wikipédia alors que le bougre dispose d’un casting 3 étoiles. Pour le naturel et l’émotion on repassera. De plus ce montage galopant semble dissimuler le fait que Nolan n’assume pas son concept et ce qui fait habituellement le sel de son cinéma, à savoir la description des règles de l’univers mis en place. Ici après des explications laborieuses (et pas toujours très logiques), le film se fend d’un « Il faut y aller à l’instinct » Et pour cause, si l’on s’arrête pour y réfléchir, on se rend compte que ça ne tient pas debout deux minutes, mais trop tard ! Pas le temps de gamberger, on a déjà changé de ville, de mission, de protagonistes.
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Passé les explications théoriques laborieuses, on compte sur une mise à l’image plus didactique ou accouchant d’un minimum d’idées visuelles. D’autant plus que la première scène d’action, contrairement à d’habitude chez Nolan, a bénéficié d’un minimum de chorégraphie. C’est donc la douche froide lorsqu’arrivent les premières scènes d’action « temporelles » qui oscillent entre l’illisible et le banal. De plus, un tour de passe-passe scénaristique (qu’on voit arriver de très très loin) nous amène à revoir les scènes d’actions mollassonnes à l’envers. A ce stade on se dit que le « mixage temporel » peut être une bonne idée sur papier mais devient complétement inopérante retranscrit à l’écran, du moins Nolan semble incapable de la rendre dynamique via sa mise en scène. L’Apothéose de ce grand n’importe quoi reste la scène de bataille finale. Moment bruyant et particulièrement incompréhensible où Nolan se sent obligé de mettre des gommettes sur ses acteurs afin de savoir qui est qui (et dans quel sens ils vont). Une scène qui ressemble à s’y méprendre au 3eme acte d’Inception, ici la confusion s’ajoutant à l’ennui. Question scénographie temporelle, à elle toute seule, la scène de vif argent dans X men days of futur past sorti en 2014 ridiculise tout le film de Nolan.
Alors que reste-il après ce triste constat ? Malheureusement plus grand-chose. Le scénario voulant aller tellement vite qu’il en oublie de faire respirer les personnages. La relation entre « le protagoniste » (John David Washington) et Neil (Robert Pattinson) se réduit à un Twist téléphoné. On est loin de l’impact émotionnel d’un Doctor Who qui traitait les mêmes sujets ou les délires scénaristiques de Rick & Morty qui semblent finalement bien plus profonds que tout ce charabia physico-neuneu. Débarrassé de toute la façade pseudo intellectuelle, Tenet ressemble à un sous James bond (Nolan est fan de la franchise), ou un Méchant Russe veut détruire le monde parce qu’il est très méchant. Accompagné de son garde du corps géant, mutique et chauve et battant sa femme qui le trahit en passant du côté des gentils, tout ce petit monde courant après un Macguffin. Il ne manque plus qu’un nain dans une valise et le compte est bon.