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« L'Occident ne représente ni un lieu, ni un repère cardinal, car c'est avant tout le champs historique d'un vaste projet politique et marchand. L'Occident n'est pas à l'Ouest, ce n'est pas un lieu : c'est un projet.»

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Billet de blog 26 mars 2025

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Marie Dosé (avocate) : "J'avais besoin de créer mon propre rapport à la profession"

Transcription d'un extrait d'entretien avec la pénaliste donné le 5 mai 2023 à LQTC / Les Temps qui Courent dans le contexte des manœuvres de l'avocat de Gérard Depardieu à l'ouverture du procès.

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Dans la série : "D'autres justices sont possibles..." (et elles existent) • Épisode 1 : Marie Dosé

Plutôt que de seulement lire ma transcription, je vous encourage d'abord à aller à la source : l'entretien - et la voix vivante enregistrée - sont ici. Mes emphases pour lecteurs pressés par "l'actualité" et l'hyper-saturation "d'informations".

"On ne m'impose pas une défense.

"Par exemple : celui qui va vous expliquer que, vous comprenez, finalement ...

(...)

"Moi, ce que je veux qu'on plaide, c'est que ... 

(...)

"Ça c'est Non ! Ça c'est non ! Ça c'est non.

"Mais c'est pas [non plus] bon ben moi Monsieur, je m'en vais et je pars. C'est pas ça mon métier. 

"Mon métier c'est d'abord de contredire. 

"Mon rôle, ce n'est pas de conforter quelqu'un dans une idéologie qui l'a conduit à commettre le pire. 

"Pardon ? Pardon, c'est pas ça mon rôle !

(...) 

"Je ne vais pas les aider à plaider n'importe quoi. Ou à se défendre n'importe comment. 

"Le parloir c'est la base du travail d'un pénaliste : le temps qu'on passe au parloir. S'arrêter sur une virgule d'un procès-verbal. Monsieur, à ce moment là, vous avez dit ça. Ça veut dire ? Il vous donne une explication. D'accord. C'est pas possible. On peut pas tenir cette défense devant le tribunal. Je vais vous expliquer pourquoi. Parce qu'en fait, quand vous dîtes ça, c'est pas vrai. C'est pas comme ça que ça c'est passé. Chronologiquement, c'est pas du tout ce que vous êtes en train de dire.

"Et tout ça, ensuite ça existe

"Il faut faire progresser la personne. Dans 90% des cas, nous, nos clients, on les convainc de reconnaître les faits. 

"Moi j'adore le fantasme de l'avocat pénaliste : [Eux :] ouais alors ils savent qu'il est coupable, mais en fait il plaide innocent, alors qu'en fait ils savent qu'il est coupable et ... [MD :] Non mais c'est pas ça l'histoire. C'est juste que nous on arrive avec un dossier, qu'évidemment dans le dossier, il y a assez d'éléments pour rentrer en voie de condamnation, et que le justifiable lui [il ne peut pas] ... 

"Mais parce que c'est l'effondrement psychique de reconnaître une infraction terrible : il continue à nier.

"Nous, notre métier, c'est de le convaincre. Non pas de dire la vérité : la vérité ça n'existe pas. Mais de reconnaître. L'important, c'est qu'on ne triche pas. Même parfois avec le mensonge.

"Je me souviens d'une personne qui avait commis des violences sexuelles sur sa belle-fille. Le dossier le démontrait. La gamine était merveilleuse. Et il ne pouvait pas reconnaître. Il ne pouvait pas reconnaître. On a travaillé, on a essayé : il ne pouvait pas. Il ne pouvait pas parce que si il reconnaissait cette infraction, tout s'écroulait. C'était l'effondrement, et c'était aussi le basculement vers des pensées suicidaires qui étaient là, qui auraient gagné en force. Donc il ne pouvait pas.

"Je me souviens très bien lui avoir dit : bon, très bien. Vous ne pouvez pas. Mais est-ce que vous me laissez libre de plaider ce que je veux ? [Lui :] Oui, mais pas que je suis coupable. [MD :] J'entends. Mais est-ce que vous me laissez libre de plaider ce que je veux ? [Lui :] Oui.

"Je me souviens très bien d'avancer dans ma plaidoirie en me disant : tu vois, regardes, il ne m'arrête pas ... ton beau-père.

"Je suis en train de dire que tu es pas une menteuse. Je suis en train de dire que tu es une gamine extraordinaire. Je suis en train de dire que tu as un immense courage. Et regarde, il ne m'arrête pas ! Et, et, et, et j'ai avancé, comme ça ...

"C'était une vérité parmi d'autres. Je n'ai pas trahi celui que je défendais en disant : il est coupable de violences sexuelles sur sa belle-fille. Je n'ai pas non plus dit qu'il était innocent. J'ai essayé de construire une passerelle entre lui et le tribunal, et entre lui et sa belle-fille.

"Ça c'est constructif. En fait, notre rôle, c'est ça aussi, parfois.

"Moi je m'en fous si c'est être auxiliaire de justice, ou avocat de la défense, ou ... J'en sais rien.

"Mais en tout cas, à ce moment là, ce qu'il m'a autorisé à faire, ben elle, elle s'en souviendra."

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A voir également son fil sur X, interrompu le 11 mars 2024, également très édifiant.

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