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Billet de blog 27 mai 2016

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Hervé Ghesquière La blessure

« Voir Sarajevo et renaître » Le grand reporter et ancien otage des talibans, Hervé Ghesquière, était l'invité d'Audrey Pulvar mardi 24 mai, à l'occasion de la sortie de son ouvrage "La blessure : Sarajevo, la vie après la guerre".

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© iTELE

Il a dit : « Je voulais parler de la Bosnie d’aujourd’hui parce que cette guerre chaude n’est pas finie. C’est une sorte de guerre froide. Une tension permanente un pays non gouverné. Ça date des accords de Dayton, sous le haut patronage de l’Europe et des Etats-Unis. Je prends souvent cette image. Il y avait un grand blessé, la Bosnie. En 1995 on a fait un garrot parce qu’il y avait effusion de sang, effusion de réfugiés, -à l’époque 450 000 Bosniens en Allemagne, 10 000 en France. Il fallait stopper cette « hémorragie ». Sauf que ce qui régit encore la Bosnie ce sont les accords de Dayton. A-t-on jamais vu un garrot, sur un grand blessé, tenir pendant vingt ans. Ce n’est pas possible. Donc ce pays reste blessé.

(…)

« C’est un pays fracturé et toujours dans cette guerre d’il y a vingt ans. La Bosnie est un cancer au milieu de l’Europe. Et Bruxelles a bien d’autres sujets à traiter –la crise économique, les vagues de migrants, le nationalisme un peu partout (on l‘a vu en Autriche, aussi en Hongrie en Pologne). L’enfer de la Bosnie, les nationalistes en ont rêvé. L’enfer c’est le nationalisme. Allez en Bosnie et vous verrez ce que vous promettent les nationalistes en tous genres, en Europe.  

(…) Aujourd’hui Sarajevo est redevenue une ville lumière qui oublie son malheur. Cette ville était multi culturelles. C’est terminé. Aujourd’hui elle est à 90% musulmane, bosniaque. Certes les autres communautés, croates, serbes orthodoxes peuvent vivre bon an mal an ; cela dit il y a des pressions sur eux.   C’est compliqué pour eux d’avoir un poste à responsabilité lorsqu’on est serbe ou croate.

Trois présidents, 200 ministres, c’est de la folie. Et la corruption à tous les niveaux. A Sarajevo tout s’achète. Avoir du travail, aller à l’hôpital… Par exemple, les femmes de ménages sont obligées d’emprunter à la banque pour pouvoir payer ceux qui vont lui donner du travail… (…)

A propos de Sebrenica. C’est la tache sur la Bosnie. Nous avons laissé faire. Nous la France, nous les Etats-Unis, nous le Royaume Uni, 8000 hommes ont été tué en huit jours. 1000 par jour. Là-bas ils appellent ça un génocide. C’était les 20 ans en juillet dernier. Tout le monde est venu s’incliner, avec la petite larme de circonstance, Bill Clinton, Madeleine Albright, La rance à peine représentée. On a laissé faire. C’est la real politique. Cette p. de poche bosniaque devait être effacée de la carte. (…)

Illustration 2

« Je me demande ce qui se cache dans les secrets de l’âme de ces anciens combattants serbes. Ont-ils été témoins des crimes de guerre ? Acteurs du nettoyage ethnique ? Je m’interroge sur cette façon de nier et de travestir le passé. Pourtant, de longues enquêtes approfondies ont révélé des atrocités et des massacres à grande échelle. Après plus de vingt ans, je perçois au mieux le silence, au pire le mensonge. Je m’apprête à partir quand Srˉdan lâche : “Une nouvelle guerre est possible. Les Balkans sont un baril de poudre, et les Musulmans d’ici se sentent plus turcs que les Turcs.” Je songe à cette phrase lourde de menaces et imagine que le vétéran et quelques-uns de ses camarades ressassent chaque jour ces histoires de guerre au fond du bureau poisseux de leur association. L’avenir ne s’annonce pas radieux. »

Hervé Ghesquière était à Sarajevo, en 1992, quand la Yougoslavie a explosé, marquant le début d’un des conflits les plus meurtriers de cette fin de siècle, en plein coeur de l’Europe. Vingt ans après, il est retourné sur ses traces, pour un périple de neuf mille kilomètres dans une Bosnie marquée au fer rouge de la guerre. Le nationalisme et la corruption n’ont cessé depuis de ronger un pays en proie au sectarisme et au populisme, qui mènent inévitablement au précipice. Un récit éclairant, à l’heure où l’Europe semble sombrer dans le repli identitaire.

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