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Billet de blog 1 août 2025

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Pour être libre, il faudrait être craint ?

Ce que laisse entrevoir Emmanuel Macron de sa conception de la liberté, au travers de ses récents propos, est effrayant. Sa représentation de ce que sont les relations internationales est en totale contradiction avec ce devrait être la France et elle est à l'opposé de ce qui devrait structurer les relations humaines. "Pour être libre il faut être craint" affirme Emmanuel Macron.

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Ce que laisse entrevoir Emmanuel Macron de sa conception de la liberté, au travers de ses récents propos, est effrayant.

Sa représentation de ce que sont les relations internationales est en totale contradiction avec ce devrait être la France et elle est à l'opposé de ce qui devrait structurer les relations humaines.

"Pour être libre il faut être craint" affirmait Macron, le 13 juillet, face aux armées.

Emmanuel Macron qui tient des propos idiots face aux caméras devient une habitude, on se souvient de quelques-uns : il suffirait de traverser la route pour trouver un emploi, les kwasa-kwasa sont des bateaux qui ne serviraient qu'à ramasser "du comorien", dans les gares, nous croiserions des gens qui "ne sont rien"...

Si, parfois, nous pouvons attribuer de telles imbécilités à une spontanéité que Macron, bien que président, n'arriverait pas à maîtriser, en revanche, lorsque des propos sont réitérés et dans des contextes différents, alors cela témoigne de visions bien ancrées. Ainsi, il a appuyé l'idée que "pour être libre, il faut être craint" en réaffirmant, quelques jours plus tard, le 30 juillet, en conseil des ministre, "nous n'avons pas été assez craints" suite aux accords entre l'Europe et les Etats-Unis.

Cette approche interroge. Pire, elle inquiète...

Pour être libre, il faudrait être craint ? Cela semble parfaitement incompatible avec la devise de la France "Liberté, Egalité, Fraternité". Il est inscrit que la liberté va de pair avec l'égalité et la fraternité et non la crainte.

Le Président d'un pays qui se revendique "pays des droits de l'Homme" est-il à sa place lorsqu'il associe davantage notre liberté à la crainte que l'on suscite plutôt que de la conditionner aux droits que l'on est censé respecter et faire respecter ?

Gagner sa "liberté" en suscitant la crainte, n'est-ce pas une idée qui s'inspire davantage d'une forme de terrorisme, d'une dictature plutôt que des fondements d'un pays démocratique ou d'un Etat de droits ?

Que doivent comprendre les jeunes de ce message véhiculé par le président de la république ? Comment, eux-même pourraient-ils alors chercher à se sentir libres ? Est-ce une bonne idée que de les encourager à chercher à être craints ? Qu'est-ce qu'être craint selon certains jeunes ?

Il y a, derrière ces propos irresponsables, le risque fort de voir involontairement légitimer une forme de violence dans certains quartier. Quelques grandes villes se sentent impuissantes, souvent abandonnées par l'état, face à la montée du grand banditisme et de la criminalité. Pour faire face à cela il faut d'une part chercher à éradiquer la violence avec fermeté mais il est, dans le même temps, primordial de ne pas ériger cette violence en modèle pour les jeunes qui se cherchent.

En affirmant publiquement que "pour être libre, il faut être craint" Emmanuel Macron peut laisser croire à des jeunes en situation de fragilité, en libre interprétation de ces mots, que porter une arme et se montrer capable de "faire mal" serait synonyme de liberté !

On pourrait répondre que "ce n'est pas la même chose", que les propos d'Emmanuel Macron concernent d'autres sujets. Mais cela n'est pas recevable. D'une part, nul n'est obligé de lire l'intégralité d'un article dont le gros titre est "Macron : "pour être libre il faut être craint"", tout le monde n'a pas non plus forcément envie d'aller se renseigner davantage lorsqu'il lit ce propos sur un bandeau d'information à la télévision. Le Président le sait parfaitement lorsqu'il tient de tels propos. Et d'autres part cette vision est transversale car exprimée et répétée par M. Macron dans plusieurs contextes, le mal est fait.

En tant qu'enseignant, je ne peux qu'espérer que les élèves à qui nous essayons d'inculquer au quotidien le respect de l'autre ou la communication non violente n'étaient pas devant la télé lorsque de tels propos ravageurs ont été relatés.

Contrairement à ce que pense Emmanuel Macron, la crainte n'a pas sa place au coté de la liberté. La crainte est liée à une forme d'arbitraire, elle est suscitée lorsque les conséquences d'un comportement ne sont pas clairement établie par des règles. Nous pouvons craindre une réponse arbitraire face à un comportement ou un acte. Lorsque nous ressentons une crainte alors nous ne sommes pas libres. La déclaration universelle des droits l'homme et du citoyen précise que « La liberté consiste à faire tout ce qui ne nuit pas à autrui » : alors, si nous sommes craints, nous ne sommes pas libres non plus.

Être libre c'est respecter les autres et se respecter soi-même. Si M. Macron respectait davantage la France et les français tout comme les instances Européennes respectaient davantage les peuples européens alors les négociateurs européens auraient été en mesure de défendre des accords plus justes, portés par la force de leurs convictions et non par l'espoir de susciter la crainte.

Il est temps d'avoir un président à la hauteur de la fonction, un président qui n'aurait pas besoin de "craindre" les précaires, les chômeurs, les migrants, les soignants, les enseignants pour les respecter...

Pour être libres, changeons de Président !

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