Egoïsme. Attitude ou conduite de celui qui, le plus souvent consciemment, ne se préoccupe que de son intérêt ou de son plaisir propre au détriment ou au mépris de celui d'autrui.
Samedi matin. Une sortie de métro parisien, encore quelques traces de la neige qui est tombé les jours précédents. Partant faire campagne pour les élections régionales qui viennent, je tend un tract à un passant. "Pfff. J'm'en fous de tout ça. J'suis un individualiste, moi ! Le collectif, j'aime pas ça !" Douche froide.
Vendredi soir. Rentré d'une soirée animée, j'allume mon ordinateur, me connecte au flux d'informations pour savoir. Savoir sur quoi a finalement débouché le sommet de Copenhague, qui rassemble depuis de nombreux jours des délégués de tous les pays pour réfléchir et surtout agir pour l'avenir de notre écosystème. Rien. Enfin, presque rien. Une coquille vide, n'engageant que celles et ceux qui veulent bien signer un bout de papier empli de belles promesses sans lendemain. Désespoir.
Comment battre en brèche cet égoïsme, celui du bien portant refusant de voir la misère l'environnant, et plus que tout refusant de payer son écot pour l'intérêt général. Comment mener chacun à embrasser l'avenir de tous, au-delà des considérations individuelles. Comment mettre en branle une société pour qu'elle se meuve unie dans une même direction. Ce Sommet de Copenhague a été de part en part un gigantesque jeu de dupes, où les pays industrialisés ont joué à "Je te tiens, tu me tiens..." pendant des heures, sachant pertinemment que ceci ne mènerait nulle part si l'une des parties ne s'engageait pas d'elle-même dans une spirale vertueuse. L'Europe porterait ainsi son effort de réduction d'émission de gaz à effet de serre de -20% à -30% (à l'horizon 2020 par rapport à 1990), si et seulement si ses comparses consentaient à faire de pareils efforts dans leurs contrées... A ce jeu de poker menteur, nul ne pouvait être gagnant, surtout ceux disposant d'une mauvaise main et de peu de ressources à jeter sur le tapis vert. Un arbitre, une conscience supérieure pour ceux qui en manqueraient, une vision dégagée des contingences immédiates pour tracer un avenir commun, voici ce qui nous a manqué en l'espèce. L'Organisation des Nations Unies a échoué à accoucher de cette nécessaire étape de sublimation des intérêts particuliers pour aboutir à un intérêt général transcendant ces considérations singulières, car elle ne dispose pas du mandat clair et de la force nécessaire pour s'imposer aux souverainetés nationales. L'ONU n'a été ici qu'une simple concaténation de pays, d'intérêts, mais en aucun cas le ferment d'un accord mutuel et contraignant, s'imposant à l'ensemble des pays à l'issue d'un débat équitable dans lequel chacun se reconnait.
Alors, que faire ? Nicolas Sarkozy critique vertement le système onusien : "Les décisions au consensus, pas de veto, une organisation comme si on était encore au XXe siècle a trouvé ses limites". La solution moderne, celle digne du XXIe siècle (tarte à la crème de tous les mauvais communicants), résiderait donc dans la formation de petits cénacles de gens bien sous tout rapport, à même de prendre des décisions informées. Les grandes personnes se retrouvent autour de la table pendant que les enfants mangent dans la cuisine. Les G7, G8 puis le G20 de Pittsburgh, aujourd'hui le G27 de Copenhague qui rédige un "accord" et l'annonce avant même d'avoir consulté les autres délégations... Est-ce cela l'avenir de la diplomatie internationale ? Sacrifiera-t-on l'idéal d'internationalisme et du multilatéralisme sur l'autel du pragmatisme et de l'efficacité ? Ce fameux pragmatisme, le seul à même de faire avancer les choses, se dégageant de la lourdeur de la consultation directe de tous, devient le faux-nez des égoïsmes des puissants et de leur immobilisme. Car si accord il y aurait à l'issue de Copenhague, sa valeur serait bien faible car il ménage particulièrement les pays les plus riches tout en ignorant certains pays n'y trouvant pas de réponse à leurs questions les plus pressantes. La pratique démocratique est un exercice périlleux, mais elle est le seul gage que l'ensemble des parties se reconnaissent dans les décisions prises en leur nom. La démocratie mondiale doit mûrir et se doter des instruments de dialogue nécessaires, mais les récents événements ne semblent pas en indiquer le chemin. " Franchement, le collectif, j'aime pas ça ! "