Vive la Turquie !

Recep Tayyip Erdogan n’est certainement pas un ange, mais il n’est pas non plus le diable qu’on s’obstine à nous décrire depuis de longues années. Car enfin, en diabolisant Tayyip Erdogan quel message envoie-t-on à la société civile turque qui s'est rangée sans exception, (patronat, syndicats, partis politiques de l'extrême droite à l'extrême gauche, médias pro et anti-gouvernement...) derrière la légitimité démocratique du pouvoir et a condamné la tentative de coup d'Etat ? Que non, elle n'a pas fait preuve d'une vitalité démocratique exemplaire et inédite dans ce pays jusqu'ici résigné aux coups d'Etat militaires, mais qu'elle s'est livrée à un dictateur islamiste ? C'est nier l'opportunité exceptionnelle de cet élan démocratique qui voit le parti au pouvoir reconnaître les mérites de partis et de médias d'opposition, et l'opposition reconnaître le courage insensé des partisans du pouvoir face aux chars des militaires. Dans un pays où le débat politique s'est souvent réduit à des échanges d'insultes, mais qui pourrait avoir trouvé l'occasion de créer un socle de valeurs communes au nom de la démocratie, quel intérêt les pays démocratiques trouvent-ils à désespérément continuer de lire la scène politique turque comme un conflit entre "laïcs" et "islamistes" ? Et si, sur cette terre de Turquie, où l'on trouve à chaque coin de rue et chaque détour de sentier des traces de l'antiquité grecque et romaine, de la culture chrétienne, de la culture juive, de la culture musulmane et des idéaux de la République française, on avait décidé d'en finir avec la guerre des civilisations - au nom de la démocratie ?