Jambes croisées, dos droit, digne,
Sur son carton d’emballage,
Il trône.
Toutes proches, insouciantes,
Des lycéennes plaisantent.
Attablée à une terrasse, lointaine, une femme fume.
Tintement d’une pièce négligemment jetée.
A tâtons, le vieillard la ramasse
Et, dans sa boîte, la place.
A ses côtés, une pancarte,
« Je suis aveugle, s’il vous plaît… ».
Parfois, une crispation douloureuse sur le visage,
Des paupières qui battent sur des yeux meurtris.
Soudain, comme alerté, la tête il tourne.
Elégante, une femme passe,
Contemple la scène
Revient sur ses pas,
Saisit le grimoire,
Décidée, jette quelques mots.
Le Vieux se penche,
Touche les chaussures
Pour identifier.
Sa rédaction achevée,
La Belle, soigneusement, le grossier papier
Replace.
Dernier regard, dernier sourire,
Elle s’éloigne.
Soudain le monde s’est transformé,
Une jeune fille se baisse,
Présente une pièce.
Puis une autre
Et encore une autre.
Génuflexions…
Repasse l’Inconnue,
Devant lui s’arrête.
Intrigué, il se penche,
Caresse les souliers,
Reconnaît.
« - Qu’avez-vous fait ?
- J’ai écrit la même chose mais avec des mots différents ».
Avec empathie elle touche son épaule,
Lui sourit
Et s’éloigne.
Sur la pancarte est écrit :
« C’est une belle journée
Et je ne peux la voir … »
G.B.