L'ancien "courrier des lecteurs" avait-il du bon ?
Les billets transmis par les "fidèles" lecteurs étaient triés par les journalistes avant d'être publiés et, quand il l'étaient, le lecteur recevait un courrier de remerciement et était informé de la date de parution de l'article.
Il y avait un tri, une relecture, des coupes, pour être, sans doute, en conformité avec la ligne générale du journal.
Il fallait du temps, et l'échange Presse / Lecteurs n'était pas impulsif. L'émotion, si elle existait, était contenue. La rédaction du billet, elle-même prenait sa source dans une réflexion (on utilisait la vieille Olivetti). Une distance salutaire s'instaurait favorisant plus la controverse que la polémique.
Le temps long de l'échange calmer le jeu, mais c'est vrai que la Presse était en papier...
Bon! Pas de nostalgie, les temps changent. Les outils numériques facilitent l'expression de chacun (au rencard la plume, le stylo bille, la vieille Underwood). Chacun peut s'exprimer librement (du moins ici et maintenant). Le flot d'informations est sans fin et multiple.
Mais qu'est ce que le lecteur y a gagné vraiment, sur le contenu de l'information ?
Je me nourris de l'air du temps et je m'exprime.
Un blog c'est bien (ça flatte l'Ego ). Des commentaires de billet c'est mieux (ça permet de penser qu'on participe au débat ). Chacun est libre de dire, d'écrire, de penser et ça c'est bon (même quant il s'agit de commentaire d'humeur)
Mais, il y a une limite... celle de l'amateur !
C'est comme les "textes libres"(sujet non imposé) de la méthode FREINET. Chacun est poête, écrivain, journaliste, artiste, historien, geographe, scientifique, économiste, juriste etc...ce qui libère la parole certes, mais nuit au contenu souvent par faiblesse de la documentation et si l'on peut dire, par manque de professionnalisme !
Car, il y a toujours quelqu'un qui sait, qui a vu, et qui peut dire quelque chose (vite une photo , un commentaire), mais tout çela est bien fragile.
Comment s'y retrouver alors, si les arguments, la documentation, le temps et l'argent manquent, et éviter que "la polémique"soit le seul moyen de faire passer "l'information", de se faire entendre.
La polémique voilà bien la (p) nourriture actuelle de l'information
Aujourd'hui, comment se faire entendre (couvrir la voix de l'autre) sans polémiquer ? Comment informer sans recourrir à la polémique ?
Y aurait-il du radicalisme dans la polémique ? La polémique serait-elle utile à l'information ?
Je réponds : NON
La polémique est une facilité, une tête de gondole pour vendre l'information dans un rayon surchargé.
Les "journalistes" sont devenus des blogueurs et les blogueurs des "journalistes". Chaque faiseur d'opinion le sait et utilise désormais ce vecteur.
Le manque de temps et d'argent favorise cette posture : pas d'analyse, pas de tri, pas de recul.
Il n'y a plus qu'a tendre le micro et c'est parti. Le fond ne compte plus, seule la forme l'emporte et le déficit d'attention du lecteur fait le lit des "sans foi ni loi" et "radicaux de tous poils".
On parle sans savoir et si on parle c'est qu'on sait. 40 micros et caméras, pas de source, pas d'investigation ; la répétition fait l'actualité et le "story telling" fait le reste.
Le schéma de la téléréalité s'est imposé partout : t'as vu la cravate du Président ? T'as vu ce qu'a dit machin ? et 60 % de faits divers constituent les principaux flashs d'information.
Les rayons de l'information regorgent de produits avariés et non contrôlés .
Le prêt à penser est là , tout est à vendre : c'est déjà les soldes pour les médias