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Billet de blog 2 novembre 2016

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À l'occasion du 75e anniversaire des fusillades de la Sablière

La commémoration d’un souvenir aussi tragique que celui qui nous réunit en ce jour perpétue, en ces temps d’impostures de tous bords, l’espoir qui anima jusqu’au bout les fusillés de Châteaubriant : celui de voir une France libérée de tous ses oppresseurs.

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Nous devons beaucoup à cet esprit de résistance, pour lequel sauver la France ne pouvait se confondre avec la sauvegarde d’une société soumise aux intérêts d’un patronat dépourvu du sens de l’honneur le plus élémentaire. C’est l’espérance en des jours heureux qui amena le Conseil National de la Résistance à poser les bases d’une réforme qui visait notamment à protéger les travailleurs des aléas de la vie, en mettant en place une solidarité financée par la création de valeur ajoutée.

Illustration 1
23 octobre 2016, distribution de tracts à Châteaubriant. De gauche à droite : Gigi, Suzanne, Loïc et Gwénaël

Ce modèle est plus que jamais critiqué, à droite comme à gauche, au motif qu’il ne correspondrait plus aux exigences du monde tel qu’il est. Il nous faudrait nous résigner à obéir sans rechigner aux desiderata de l’Union Européenne (UE), garante d’une concurrence libre, non faussée et, pour tout dire, absolument vertueuse. Ce serait le prix à payer, nous ressasse-t-on à longueur de colonnes et de temps d’antenne, pour rester compétitifs dans un environnement économique ouvert à tous les vents, passant sous silence le fait que ce sont les traités européens et l’euro qui, justement, empêchent les États de protéger efficacement les travailleurs, quand bien même leurs gouvernements ne seraient pas assujettis aux dogmes économiques de l’UE.

Mais nous ne pouvons plus nous permettre de ne pas résister, sinon, c’est l’espoir même qui s’éteindra, laissant place à la résignation et au néo-fascisme ! Comme l’a rappelé à juste titre la secrétaire de l’Amicale de Châteaubriant, Carine Picard Niles, c’est en luttant que nous nous montrerons dignes de la mémoire de nos camarades assassinés. L’esprit de résistance souffle encore : la lutte menée en grande partie par la CGT contre une loi directement inspirée par la Commission européenne, la loi travail, montre que la classe ouvrière n’a pas renoncé à se battre, envers et contre tout. 

Le résultat de l’action syndicale n’est certes toujours pas à la hauteur des espérances, mais la lutte est l’occasion de faire l’expérience, à des degrés divers, d’une fraternité qui exprime peut-être le mieux le projet de société que nous appelons de nos vœux. Sans cette expérience de la fraternité vécue, le peuple se meurt, se désagrège dans l’individualisme, et s’y substituent alors les associations de consommateurs, les réseaux sociaux…

En réalité, ce qui manque aujourd’hui le plus aux travailleurs de France, c’est un parti qui les unirait en une classe consciente d’elle-même, qui en aurait au moins la volonté affichée. Il y a quarante ans, le PCF renonçait à la dictature du prolétariat pour mieux se couler dans l’eurocommunisme naissant. Ce fut le début d’une série de renonciations idéologiques, de scrupules lâches, qui sapèrent l’espoir de mettre fin au capitalisme. Car, en quoi la dictature du prolétariat consiste-t-elle au juste ? Non pas à interdire la démocratie – que de bêtises ont été dites à ce sujet –, mais à empêcher le retour du mode de production capitaliste !

Résultat, nous avons obtenu à la place la dictature de l’UE, dont Alain Madelin a pu vanter les effets, au début des années 90, sans s’embarrasser de ménager la susceptibilité de communistes privés d’ambitions :« Le traité de Maastricht agit comme une assurance-vie contre le retour à l’expérience socialiste pure et dure ». L’urgence est aujourd’hui de se réapproprier l’héritage de ce que fut le PCF du temps où il se réclamait de Marx et de Lénine, non pas pour cultiver une nostalgie de naphtaline, mais pour se donner les moyens de combattre le capitalisme et de le vaincre. Les programmes les mieux intentionnés n’y peuvent suffire s’ils sont condamnés d’avance à n’être pas appliqués en raison des dictats européens.

Le Pôle de Renaissance Communiste en France (PRCF) œuvre, par sa volonté de réunir les communistes autour d’objectifs concrets et atteignables rapidement – telle la sortie de la France de l’euro, de l’UE et de l’OTAN – à remettre le communisme en position de guider des espoirs qui ne trouvent plus, aujourd’hui, de débouché stratégique sur lequel se fonder. Les travailleurs n’ont plus de boussole pour les aider à se diriger dans la purée de pois idéologique qui nous entoure. Comment le pourraient-ils, quand des ombres rendues méconnaissables par la patine médiatique, tapies dans la nuit et le brouillard, sont les seules à encore leur parler et à se faire entendre ? Les communistes doivent donner de la voix, retrouver le courage de se réclamer de l’espoir qui animait, il y a 75 ans de cela, les camarades à qui on rend aujourd’hui hommage.

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