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Billet de blog 9 juin 2020

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05.06.2020 – et puis après, il se passe quoi ?

retrouvé avant de fermer le PC après trop d'heures devant l'écran

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On a travaillé lutté ou baissé les bras

On a crié sué ou pleuré, ri et joui tour à tour

Et puis après il se passe quoi ?

On va reprendre le cours de nos vies, regarder chaque chose reprendre sa place, papa dans maman, les coudes au corps mais le nez au vent, rien ne sera comme avant mais tout sera pareil.

Et merde.

On avait dit le tonton craignos out. La gonzesse frivole toute seule dans son coin. Les nazillons menottés tenus sévère à l’écart, les flics avec des fleurs en guise de LBD et tous les maires et chaque préfet adepte du bouddhisme et fervent défenseur de Vishnu.

Sauf que non. Faut pas se leurrer, c’est Lidl et Auchan qui gagnent à la fin. Et Total aussi, comme Vinci et tous leurs potes.

D’ailleurs ils gagnent quoi ? le droit de continuer, la facilité d’arnaquer en boucle, de vendre du malheur au meilleur prix, et de nous bâillonner plus serré encore qu’avant le confinement. Sauf que maintenant on n’a plus le choix, c’est urgence sanitaire, encore plus grave qu’Al Quaïda ou je ne sais quel sultan en mal de reconnaissance, plus balèze que le souvenir de Charlie Hebdo, moins oubliable que le nuage de Tchernobyl, tout est important, planquez-vous et surtout reprenez vos caddies, merci de laisser vos cerveaux sur le pas de la porte du supermarché.

 Alors j’ai repris fermement la main de Loeiza, bien au chaud dans la paume de ma petite menotte de gamine, suivi le chemin de ronde le nez au vent, les orteils un peu cramés par le mélange de soleil et de sable, la bouche sèche des heures de course dans les rochers, les cheveux collés de sel et d’embruns, mais les yeux brillants, le cœur battant et les ongles pas encore complètement rabotés de toute cette montagne de souvenirs à creuser.

La mer scintille ou s’évertue à me narguer selon le moment de la journée, tantôt complice tantôt matonne de mes instants d’égarement, je ne sais qui d’elle ou de moi dicte le pas, la couleur du jour ou l’ambiance qui, frivole ou sérieuse, nous mène à l’accomplissement.

Les arbres bruissent du nouveau coup de vent d’Ouest, je ne sais plus dans quel sens vont mes pensées, suivant la direction de mes cheveux ou des larmes qui doucement ruissellent des torrents de gravats vers les plaines fertiles de mes futures joies.

 Alors j'écoute https://www.franceculture.fr/emissions/poeme-du-jour-avec-la-comedie-francaise/anna-de-noailles-la-nuit-suivi-de-la-vie-profonde?xtor=EPR-5&actId=ebwp0YMB8s0XXev-swTWi6FWgZQt9biALyr5FYI13OqhkzSjzqMT_Q&actCampaignType=CAMPAIGN_MAIL&actSource=585627&fbclid=IwAR3tIYAEw0Yp6OgyS5GZ0ns6PBCEhw1_9GNRmqBSPqmLn6Fmm3nHtxuiODI

La vie profonde, un poème d'Anne de Noailles

Être dans la nature ainsi qu'un arbre humain,
Étendre ses désirs comme un profond feuillage, 
Et sentir, par la nuit paisible et par l'orage, 
La sève universelle affluer dans ses mains !

Vivre, avoir les rayons du soleil sur la face,
Boire le sel ardent des embruns et des pleurs, 
Et goûter chaudement la joie et la douleur
Qui font une buée humaine dans l'espace !

Sentir, dans son cœur vif, l'air, le feu et le sang
Tourbillonner ainsi que le vent sur la terre.
- S'élever au réel et pencher au mystère,
Être le jour qui monte et l'ombre qui descend.

Comme du pourpre soir aux couleurs de cerise,
Laisser du cœur vermeil couler la femme et l'eau,
Et comme l'aube claire appuyée au coteau
Avoir l'âme qui rêve, au bord du monde assise...

Poétesse française née en 1876 à Paris, Anna de Noailles était d’origine grecque et roumaine. Largement influencée par les Parnassiens, Jean-Jacques Rousseau, et plus que tout par Victor Hugo, son œuvre est marquée par un ardent panthéisme.

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