L'annonce de la nouvelle stratégie de Barack Obama est tombée comme une douche froide sur le peuple afghan. Sous la pression de ses conseillers militaires, il a cédé et accepté d'envoyer 30 000 soldats américains supplémentaires en Afghanistan. Dans le même temps, pour rassurer le peuple américain, il a fixé le calendrier de retrait des troupes à partir de juillet 2011.
L'annonce de ce retrait rend perplexes les Afghans. Ils ne comprennent pas pourquoi, en décembre 2001, la résolution 1373 de l'ONU a autorisé l'armée américaine à intervenir en Afghanistan et pourquoi aujourd'hui, de façon unilatérale, l'armée américaine se retirerait sans avoir rempli ses missions, à savoir l'éradication d'Al-Qaida et du terrorisme international, l'élimination des talibans et la reconstruction du pays.
L'échec total de la reconstruction incombe à la fois à la communauté internationale et au pouvoir afghan qu'elle a mis en place suite à la Conférence de Bonn fin 2001 et reconduit en 2004 et 2009.
Théoriquement, l'écriture de la nouvelle constitution aurait dû favoriser les conditions de création de la nation afghane. Le partage du pouvoir entre les chefs de guerre a empêché l'émergence d'une conscience politique nationale. L'Afghanistan n'est pas redevenu la nation des Afghans qui englobe plus de 28 ethnies, des langues, des cultures et des moyens économiques différents, mais un espace géographique administré depuis Kaboul et sécurisé par les armées internationales alors que l'anarchie qui règne depuis 30 ans fait que la capitale n'a toujours aucun pouvoir sur les provinces.
L'armée nationale afghane que, depuis cette date, on cherche désespérément à créer, n'est pas devenue une armée de conscrits mais une armée de « bons à rien » : un Afghan qui n'a pas de terre, pas de formation devient militaire pour gagner 50 dollars par mois. C'est une armée d'illettrés, difficiles à instruire, surtout dans des langues occidentales qui ne sont pas les leurs. La nouvelle stratégie de Barack Obama, c'est à la fois l'instruction et la formation de la police et des militaires pour la sécurisation du pays en vue du départ des armées étrangères. Cette stratégie est à terme vouée au même échec que la stratégie précédente si elle n'est pas accompagnée de la création d'une administration civile compétente. Sarah Chayes, conseillère auprès du commandement de la force de l'Otan à Kaboul, l'a déclaré récemment : « La présence des troupes étrangères est nécessaire mais elle n'est pas suffisante. Il manque une action équivalente du côté civil ».
Depuis de nombreuses années, je ne cesse de dire qu'il faut reconstruire l'Afghanistan par la base, et il est impératif pour chacun de nos 33 000 villages, de construire la mairie, de mettre en place l'état civil pour créer la citoyenneté, d'organiser les services publics - les routes, l'eau, la santé publique, la gestion des déchets, etc.
L'« afghanisation » de la reconstruction n'aura de sens que si le malek, chef de village, est assisté, conseillé et contrôlé par une administration civile démocratiquement constituée.
Pour pouvoir financer cette nouvelle société afghane, il faut créer une nouvelle économie car celle mise en place depuis huit ans est un échec.
85 % des Afghans sont des paysans et des nomades qui gèrent la rareté dans les vallées et les déserts. La complémentarité, ô combien laborieuse, de ces deux peuples ne donne qu'un revenu d'un dollar par jour et par habitant, et une espérance de vie de 40 à 45 ans selon le sexe.
Le modèle calqué sur l'économie de marché a
En Afghanistan, les conditions du développement ne passeront pas par l'économie libérale des marchés, mais par une politique cohérente de reconstruction en direction des plus pauvres.