L’amour passionnel, intense, est toujours une domination. Il est bien trop instable pour durer. Vu et revu ? Probablement. Comble de l’inintérêt ? Pas forcément. La bonne volonté ne suffit pourtant pas à voir dans Mon Roi, quatrième réalisation de Maïwenn, autre chose qu’un film sincère. Il est vrai que cette histoire d’amour intense entre une brillante avocate (Emmanuelle Bercot) et un restaurateur charmant mais flambeur (Vincent Cassel), se prête au pathos. Seulement là, c’est l’overdose. Si les acteurs confèrent à leurs personnages une dimension théâtrale certaine, les clichés et l’impression du téléfilm de série B ne sont jamais loin. En choisissant de raconter cette histoire, du seul point de vue féminin, soumis de plus, la cinéaste sombre par excès de morale et de manichéisme. Le titre du film mettait pourtant en garde et rappelait par l’emploi du possessif et de la première personne, que ce n’est pas le couple mais bien la femme, ou l’homme, qui serait au centre. A travers la souffrance métaphorisée en chute et puis la rééducation, la cinéaste éloigne sa Tony des bras empoisonnés de Giorgio, le roi des salauds ou des bouffons, ou des deux.
Bien que la construction narrative en flashback casse la linéarité et relève le rythme de l’œuvre, les séquences montrant Tony se reconstruire au centre de rééducation confirment la naïveté et le simplisme de la démarche de Maïwenn. Dans un cadre littoral sensé s’opposer à sa vie parisienne, l’avocate quadra est entourée de jeunes, quelques têtes crépues et bronzées complètent le dépaysement. Là aussi, le simplisme moralisateur fait des ravages. Contrairement aux amis de Giorgio, perdus entre vacances dans le sud, cocaïne et soirées arrosées ; en rééducation, les jeunes de cité sont humbles, drôles et savent jouir des plaisirs simples. On devine que le confort et le faste dans lequel vit Giorgio, cet « adolescent », ne les a pas corrompu, eux. Car le restaurateur à qui tout sourit, n’est pas qu’un flambeur mondain, c’est aussi celui dont l’immaturité gâche le charme. Celui qui allume tous les espoirs sans jamais les assouvir. Il faut dire que tout a bien commencé pour le couple. En manque de confiance après un premier mariage, Tony revit dans les bras de son Don Juan. C’est même de lui que vient l’initiative de fonder une famille.
Incapable de se détacher de ses anciennes habitudes, il se fait de plus en plus rare à la maison. L’excellence de Vincent Cassel réussit cependant à lui conférer une certaine humanité, dans ses regards fuyants et ses moments de faiblesse. C’est pourtant un personnage aux traits de caractère bâclés. Dont les rapports qu’on imagine difficile avec un père invisible auraient pu être creusés en profondeur. A défaut, condamné à la caricature, il finit par accepter, on ne sait trop comment, son rôle de père pendant que Tony finalise sa rééducation. Le film souffre aussi d’un scénario peu travaillé. Si l’humour est quelques fois réussi, grâce notamment aux improvisations de Vincent Cassel et de Louis Garrel, la solennité générale est souvent pesante. Mais au-delà de ces questions, c’est surtout le décalage entre le comique et le tragique des deux personnages qui empêche de plonger dans leur histoire. Là encore, Emmanuelle Bercot, justement primée à Cannes, n’y peut pas grand-chose. Le casting aura décidemment relevé le goût du film, sans le sortir du lot pour autant.