Il est vrai, que dans un contexte très à droite, l'espoir à gauche s'accroche, faute de mieux, à ces tribuns qui
monopolisent la scène politique, ceux qui dans une polyphonie sinistre surjouent les mêmes discours. Une polyphonie
qui fait dire à beaucoup, que Yannick Jadot, Fabien Rousselet, Anne Hidalgo ou Jean-Luc Mélenchon ne font que
décliner le même refrain d'une gauche unie... où celle-ci ne saurait se faire que derrière leur personne !
Naviguant sur un autre registre que Jean-Luc Mélenchon, le candidat écologiste Yannick Jadot, n'a pas les outrances du
leader des insoumis. «Vert nuancé» selon le mot de Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, il se fait l'apôtre d'une
«écologie de gouvernement» évitant soigneusement de porter aux nues un discours de la décroissance qui fait débats.
Heureux temps pourtant, pour cette homme que bien des médias proclament «l'homme du moment vert», celui avec qui
la France mettra en mouvement une politique sociale, respectueuse de la planète. Celui aussi, et c'est bien là sa
faiblesse, dont le programme ne parle guère aux classes populaires, tant il est vrai que concocté loin des quartiers HLM,
il ne fait pas sens à celles et ceux dont les fins de mois sont la première préoccupation.
Surfant sur les ruines du parti socialiste, Arnaud Montebourg et Anne Hidalgo tentent de faire valoir des propositions qui
en d'autres temps auraient emporté bien plus de suffrages qu'ils n'en récoltent à ce jour. Ce qui fait regretter d'autant la
récente proposition de la maire de Paris pour une primaire à gauche, quand elle intervient dans un temps où elle tutoie les abimes dans les sondages. Ses adversaires de gauche ne se privent d'ailleurs pas de le souligner... oubliant qu'ils avaient essuyé il y a peu, le même refus avec leur politique de la main tendue.
Dans un autre genre, Fabien Roussel pour le PCF, se dit prêt à relever « le défi des jours heureux ». Disons le tout net,
quand il souhaite se convaincre que « la diversité à gauche n’est pas un problème », il résume assez bien le déni du
trop plein des candidats à gauche. Un déni qui est aussi le signe d'un fourvoiement de l'ensemble des partis de gauche,
lorsque ceux-ci sont incapables de se mettre autour d'une table pour discuter d'un programme commun, comme ce fut le
cas en octobre 1971 .
Il est vrai qu'à cette époque, la France inaugurait une période, où à la suite de mai 1968, tant la jeune génération que les
classes populaires aspiraient au partage des bénéfices issus des Trente glorieuses. Rien de tel possible aujourd'hui. La
France d'aujourd'hui n'est pas celle d'hier. Le tissu industriel s'en est allé et avec lui les emplois qui quadrillaient
l'hexagone. La souveraineté nationale s'est diluée dans une Union européenne qui tient plus du grand marché que d'une
affirmation politique de ses états membres. Le brassage des populations lié à la délocalisation des emplois, la
désertification des campagnes et le phénomène migratoire, fait de la « vieille nation » un pays où les antagonismes se
déchirent entre partisans d'un repli identitaire et ceux prônant le multiculturalisme.
Toutes ces choses qui à six mois du premier tour de la présidentielle de 2022, font que les ambitions des ténors de la
gauche se portent contraints et forcés vers les prochaines législatives. Avec pour le PS, que EEVL, le PC ou LFI, l'espoir
de récolter quelques miettes du festin auquel se préparent la droite et les macronistes. Pour expliquer ce naufrage, faut-il croire que la gauche dans son entier paye aujourd'hui des errements qui remontent à
loin, ceux d'une politique mitterrandienne, reprise avec des fortunes diverses par ses successeurs ? Une politique
droitisante dont les acquis apparaissent avec le temps bien plus sociétaux que sociaux. Une politique qui au final, a
sombré avec les derniers jours du quinquennat de François Hollande, celui qui restera dans les mémoires comme la
quintessence du naufrage politique.
Reste l'histoire à venir où les partis de gauche d'aujourd'hui et leurs leaders avec, auront à répondre de leurs
agissements et des conséquences tragiques que cela implique. Par leur aveuglement et leur obstination, et sauf
retournement de dernière minute, la France de demain est promise aux discours trompeurs d'une droite plus
conservatrice que jamais, une droite tentée de se raidir à chaque virulence de l'extrême droite ou de bateleurs à la sauce
Zemmour.
Pour le peuple de gauche, l'avenir s'annonce sombre. Pourtant il espère encore et toujours. Un sondage Odoxa/Mascaret/l'Obs du 10 décembre 2021 révèle que 86 % des sympathisants de gauche souhaitent une primaire réunissant l'ensemble de leurs candidats: respectivement 89 % des
écologistes, 87 % des socialistes, mais aussi 83 % des « insoumis ». Sera-t-il entendu ?