Article écrit à "deux voix" avec Franck Lirzin ici.
La Commission a adressé le 28 mai 2008 un coup de semonce à la France. Dans son « policy advice » Bruxelles « encourage la France à poursuivre l’assainissement budgétaire ». Car celle-ci flirte dangereusement avec le seuil des 3% de déficit public.
Mais pourquoi notre pays a-t-il encore décroché le bonnet d’âne budgétaire européen ?Sont-ce nos recettes qui ne seraient pas assez élevées ? Peut-être. Difficile, pourtant, d’accroître la pression fiscale. En 2007, selon Eurostat, le taux de prélèvement français (44% du PIB) était supérieur à la moyenne européenne (39,6% du PIB). Et la France se plaçait en tête du peloton pour sa fiscalité sur le travail et le capital (respectivement 2è et 4è de la zone euro).Dépenser moins ou dépenser mieux ?Alors, sont-ce nos dépenses qui seraient trop élevées ? Les français sont de gros consommateurs de protection sociale. Leurs dépenses sociales s’élèvent à 53,4% du PIB en France, contre 43,2% au Royaume-Uni (Eurostat). Mais la protection sociale à la française n’explique pas complètement notre déficit. La Suède parvient à l’équilibre budgétaire avec des dépenses sociales plus élevées (52,8% du PIB). Miracle ? Non, les Suédois payent plus d’impôts que les Français (51,2% du PIB). Conclusion : les Français vivent au-dessus de leurs moyens. Alors ? Plus d’impôts ? Moins de prestations sociales ? Ou…… dépenser mieux ? La mission est possible. Nos voisins comme l’Espagne ou le Royaume-Uni ont réussi à redresser leurs comptes en rationnalisant leurs finances publiques. La chasse au gaspi est ouverteMais certaines mesures demandent du courage politique. Le salaire des fonctionnaires constitue l’un des principaux postes de dépense de l’Etat (43,7%, selon le rapport 2008 de la Cour des Comptes). Comment diminuer ces dépenses en gardant la même qualité de service ? Le Royaume-Uni a déplacé la frontière entre le public et le privé. Il a demandé au privé de participer à des missions assurées autrefois par le public (construction de routes en partenariat public/privé). D’où un besoin moindre en fonctionnaires.Côté Sécurité sociale, les dépenses des établissements de santé plombent le budget. La répartition géographique des hôpitaux, notamment, semble sous-optimale : 110 lits pour 10000 habitants dans le Limousin, contre 71 en Ile-de-France (Rapport Larcher). Faut-il fermer des hôpitaux ? Créer une nouvelle carte hospitalière ? Le rapport Larcher avance des pistes. Il propose de regrouper des hôpitaux par pôles régionaux.Reste que la dépense publique semble emportée par un cycle infernal. Plus un fonctionnaire économise, plus ses crédits lui sont rognés l’année suivante. Plus il dépense, plus il montre que son service est actif. Au point où, en fin d’année, certains ministères achètent en cascade ordinateurs et fournitures de bureau, pour claquer leur trop plein de sous. La nouvelle "gestion par la performance" de la fonction publique permettra peut-être, à terme, de récompenser les fonctionnaire bons gestionnaires.
L’avertissement de Bruxelles sera-t-il salvateur ?La dévaluation a longtemps joué le rôle d’épouvantail, et servi d’aiguillon pour réformer. Aujourd’hui, dans la zone euro, cette menace n’existe plus. Il reste la pression des pays voisins. Car au final, ceux-ci payent notre déficit par des taux d’intérêt plus élevés et non mérités, mauvais pour leur économie.Le coup de sifflet du gendarme bruxellois suffira-t-il ? A vos réformes !(Post écrit en collaboration avec Franck Lirzin, du club de Médiapart)