Hélène Yvonne Meynaud

Abonné·e de Mediapart

11 Billets

0 Édition

Billet de blog 16 juillet 2014

Hélène Yvonne Meynaud

Abonné·e de Mediapart

Les Conseils de Prud'hommes sous tension

Hélène Yvonne Meynaud

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

J’ai lu avec intérêt la Question de Droit social de Jean-Emmanuel Ray dans le Monde du Mardi 15 juillet 2014. Le professeur pose des questions importantes sur le fonctionnement des Conseils de prud’hommes auquel il est difficile de répondre vite. Et pourtant…

Si effectivement peu de conciliations prennent place, c’est que souvent les parties (avocat, Défenseur ou Conseiller du salarié, l’employeur parfois, le salarié souvent) « viennent chercher une  date » pour leur Bureau de Jugement. Néanmoins entre la Conciliation et le Bureau de Jugement, 25% des affaires disparaissent par transaction privée ou désistement d’instance et d’action. Est-ce le fruit de l’effort des juges, et de la rencontre des avocats et autres parties en Bureau de Conciliation ? Par ailleurs, la conciliation consiste aussi à rendre des ordonnances (obtenir des documents demandés pour prouver un préjudice, toucher des indemnités ou salaires non contestables, etc.), et les juges disent le droit, ce qui contribue à préparer le Bureau de Jugement. Pourquoi le supprimer ? Pour proposer de la médiation privée et payante comme aux Etats-Unis (entre 400 à 15000 dollars) ? Je rappelle que la juridiction prud’hommale est gratuite pour le demandeur de justice.

Le juge départiteur venant faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre, le taux de départition monterait de manière différentielle, … ¨Peut-être est-ce le reflet d’un durcissement des positions sociales des uns et des autres dans la société du travail que l’on connaît ?

Si 62% des décisions des Conseils de Prud’hommes sont l’objet d’appel, ce n’est pas forcément parce que le jugement rendu serait inadéquat et qu’un magistrat professionnel saurait mieux le penser et le rédiger. C’est peut-être qu’une des parties est mécontente du jugement rendu, elle considère qu’elle n’a pas été « remplie de ses droits », ou tergiverse pour payer les indemnités, se sert de l’appel comme d’un levier pour établir une transaction à la baisse…

Si Les Conseils de Prud’hommes fonctionnent si lentement, c’est peut-être qu’ils sont exsangues, manquent non seulement de greffier.e.s et de personnel administratif, jusqu’aux ordinateurs et au papier pour imprimer les fax….

Et puis, nous étions élu.e.s pour cinq ans en 2008, prolongés à sept, voire à neuf suivant les propositions du Ministre du travail Monsieur François Rebsamen. Or, des bonnes volontés se sont découragées, d’autres sont tombés malades, et la relève se fait attendre. Considérons que les juges des Prud’hommes ne sont pas moins mal élus que le député de Valenciennes (74,2% d’abstention lors de l’élection partielle du 22 juin 2014). Et que la démocratie, une jeunesse de deux siècles, est une institution précieuse.

Hélène Yvonne Meynaud

Juge des Prud’hommes

Conseil de Boulogne-Billancourt

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.