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Billet de blog 7 avril 2025

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Les misérables

Meeting du RN dimanche 6 avril 2025. Une fable.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

       "La bêtise insiste toujours." Albert Camus (La Peste).

     Lors du rassemblement national (quelques milliers d'adulateurs), organisé place Vauban, à Paris, par le mouvement éponyme ce dimanche 6 avril 2025, l’ineffable Louis Aliot, se pique de littérature, et ose lancer : "Selon que vous serez puissant ou misérable les jugements de cour vous rendront blanc ou noir"*. L’héritière du château de Montretout dépeinte en misérable, fallait oser ! C'est fait.

     Mais il a occulté, peuchère, que dans fable, la misérable victime en question est un âne qui, lui, s’était contenté de tondre un pré de Moines de la largeur de sa langue, une peccadille, alors que Madame et ses complices ont pacagé à grosses dents, sciemment et sans vergogne, quelques millions d’euros dans les caisses du Parlement européen !

     Autre différence notoire, l’âne susdit fit amende honorable, avouant bravement devant le roi Lion et son conseil, "Je n'en avais nul droit, puisqu'il faut parler net", contrairement aux mis en cause qui ont justifié de croquer des emplois fictifs sur le dos d'une Europe accusée, par ailleurs, d'être "digne de tous les maux". Que diable, "Est-ce péché ?", aurait dit le Renard lepéniste !

     En effet, peu enclins à voir, sans indulgence, l'état de leur conscience, comme y étaient invités les animaux malades, les mis en cause et leurs thuriféraires, ont torturé les faits, nié leurs forfaits, braillé "haro sur le baudet", en l'occurrence une justice "utilisée à des fins partisanes et politiques", rendue par des "juges tyrans qui exécutent l'Etat de droit" et leur bras armé, bien sûr, le Syndicat de la magistrature !

     Rassurez-vous, bon peuple, qui interpréterait ces propos avec malveillance, cela n'a pas empêché, ni embarrassé, Jordan Bardella, fringant et bonimenteur Président du RN, de déclarer, stratégie bancale de "dédiabolisation" persistante et mystifiante sauf pour les gourdiflots définitifs, les "Vive Marine !" compulsifs : "Il ne s’agira jamais pour nous de mettre en accusation ou de jeter le discrédit sur l'ensemble des juges ou de l’ensemble de l’institution judiciaire. Jamais notre mouvement ne remettra en cause la séparation des pouvoirs ou l’indépendance de la justice qui sont les garanties de l’État de droit."

     Affirmation péremptoire, vérité alternative, sulfateuse rhétorique, vous avez le choix, mais, s'il vous plaît, un peu de commisération, ne riez pas, c'est du lourd, c'est du sérieux ! Il a le soutien de l'internationale populiste, de Trump à Poutine.

     Mieux, ou pire, on manifeste, figurez-vous, aux cris de "Soutenons Marine, sauvons la démocratie", oxymore ? Quand le charlatanisme politique atteint ces sommets, on ne peut qu'être soit admiratif, soit accablé. Et, se voulant plus blanc que blanc, comme aurait dit Coluche, dernière infamie, dernière obscénité, on se compare à Martin Luther King, emblématique défenseur des droits civiques aux Etats-Unis, se battant contre le racisme et pour les Afro-Américains privés de vote et qui a payé de sa vie pour cela.

     Alors, "misérables" les condamnés, dites-vous ? Oui, mais alors selon le sens suivant que donne le dictionnaire : "Qui inspire le mépris, sans valeur. Synon. Insignifiant, minable (fam.)…Qui provoque l'indignation."

     En toute mauvaise foi, républicaine, laïque et démocratique, je m'interroge : le véritable but de ce "meeting" dominical ne serait-il pas d'agiter le peuple avant de s'en servir, selon une formule du regretté Talleyrand, un expert ?

     Que nenni, ils sont là pour "sauver la démocratie" (sic). Mais "Personne ne peut porter longtemps le masque."**

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*Les animaux malades de la peste. La Fontaine.

**Sénèque.

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