Brève histoire du Collectif Palestine de Besançon depuis octobre 2023
Dans ce blog, nous rappelons des faits ignorés dans l'article de Mme Coq-Chodorge du 16 octobre 2025. Elle n'a pas pris le temps d'interroger les différentes personnes et organisations qui se sont trouvées au sein de la crise du Collectif Palestine de Besançon ouverte à partir d’août 2024. Sans doute était-elle pressée de damer le pion à StreetPress qui a publié presque simultanément un article beaucoup mieux documenté sur l'exclusion de Mustafa Cakici par la délégation française de la Flottille Global Sumud.
Le Collectif Palestine de Besançon a été créé il y a une douzaine d'années à l'initiative de Palestine Amitié, association locale de solidarité avec le peuple palestinien. C'est un Collectif d'organisations syndicales, associatives et politiques qui organise de manière constante la solidarité avec la lutte du peuple palestinien pour son droit à l'existence, en particulier contre le colonialisme de la puissance occupante depuis la guerre de 1967.
Dès le lendemain du 7 octobre 2023, le Collectif Palestine de Besançon organisera chaque samedi des manifestations contre la guerre d'anéantissement que mène Israël contre la population de Gaza, notamment en détruisant toutes les infrastructures du territoire. Les premières manifestations ont lieu à l'appel des organisations suivantes : Palestine Amitié, LDH, MRAP, Mouvement de la Paix, ATTAC, CCFD Terre Solidaire, ACCMMA, La Nuée, Nous Toutes, Solmiré, Solidaires, FSU, AEB, CGT, A Gauche Citoyens!, Les Écologistes, Ensemble!, Gauche Ecosocialiste, Génération.s, La France Insoumise, Nouveau Parti Anticapitaliste, Parti de Gauche, Parti Communiste Français.
Mais très rapidement, le groupe « La Nuée » animé par Toufik-de-Planoise, se retire du Collectif. Ses attaques se fondent sur deux accusations :
1) le Collectif ne dénonce pas le Hamas comme une organisation terroriste (or il fait partie d'une liste d'organisations terroristes établie par les USA et quelques pays occidentaux).
2) « les jeunes » n'auraient pas droit à la parole au sein du Collectif, seuls s'exprimeraient des têtes grisonnantes, ou carrément blanches ; dans son journal, Toufik attaque régulièrement « les gérontocrates ».
Ces accusations n'atteignent pas le Collectif, qui continue les manifestations hebdomadaires, comme il s'en passe beaucoup dans de très nombreuses villes de France.
La situation change de manière cruciale fin août 2024, lorsque Toufik-de-Planoise met à la disposition du Collectif des liens vers des tweets violemment antisémites, homophobes et anti-kurdes, émis en 2014 par un membre du Collectif arrivé après le 7-octobre. Toutes les organisations du Collectif lui demandent d'effacer au moins les tweets antisémites.
Celui-ci les “archive” (sic) la semaine suivante, mais en affirmant que ces tweets ne sont pas antisémites, qu'il sont seulement antisionistes.
Son email du 28 septembre au Collectif :
Suite à la réunion du Collectif Palestine Élargi du 23 09 2024, je vous informe de la décision suivante suite à un point avec mon avocat:
Pour l'unité du collectif j'ai pris la décision d'archiver les 5 partages qui dénonçaient le SIONISME et les injustices faites aux palestiniens! que j'avais partagé il y a plus de 10 ans, en 2014 suite, encore, aux massacres de gazaouis perpétrés par les barbares Israéliens.
Malheureusement quelques personnes du collectif n'avaient même pas pris le temps de consulter le contenu de mes partages et m'accusaient injustement, tout en suivant les fantaisies de P…G… alias Toufik de Planoise.
Les publications portant sur les fausses allégations concernant "l'antisémitisme" ne sont plus visibles suite à l'archivage (qui servira pour le dossier juridique).
Prochainement, je vais lancer l'assignation en justice contre P… G… alias Toufik de Planoise.
De même pour le PCF du Doubs, suite aux propos écrits et oraux lors de la réunion du 23 09 2024, une consultation auprès de mon avocat suit son cours…
Et comme promis, je finalise prochainement mon DROIT DE RÉPONSES sur les fausses allégations et sur le hors périmètre du Collectif Palestine élargi, envoyés aux alentours du 20 aout 2024. Ainsi qu'aux abominations et fausses allégations du PCF du Doubs
Fraternellement. Mustafa
Malgré la confirmation de ses tweets antisémites, une partie de la direction du Collectif offre une issue de secours à Mustafa et lui garantit sa confiance en écrivant une Charte qu'il devra signer pour être blanchi. La Charte est suffisamment évasive pour qu'il ne se sente pas obligé d'effacer aussi ses tweets homophobes et anti-kurdes. Et dans la lettre de présentation de la Charte, on trouve la phrase suivante : « Malgré ses efforts . . ., le Collectif a dû faire face à un litige impliquant des propos jugés antisémites publiés il y a une dizaine d'années sur le compte facebook d'un de ses membres. »
À la suite de ce blanchiment ahurissant, 8 organisations quittent le Collectif par la déclaration qui suit (7 octobre 2024) :
Déclaration commune :
POURQUOI NOUS NOUS METTONS EN RETRAIT du Collectif Palestine de Besançon.
Dans le Collectif Palestine de Besançon, qui, à l'initiative de Palestine Amitié, a réuni il y a plus de 10 ans une douzaine d'organisations (Palestine Amitié, le MRAP, le Mouvement de la Paix, le CCFD-Terre solidaire, l'ACCMMA, la LDH, Solidaires, la FSU, le Parti de Gauche, le PCF, EELV, puis Ensemble!, À Gauche Citoyens!, Génération.s, la CGT...), nous n'avons jamais confondu la lutte antisioniste contre l'État juif colonial d'Israël, oppresseur des Palestiniens, avec l'antisémitisme, c'est-à-dire la discrimination des Juifs en tant que groupe ethnique, fondée sur des préjugés racialistes.
L'instrumentalisation de l'antisémitisme par l'extrême-droite et les régimes pro-nazis, dans les sociétés européennes des années 30, a conduit à l'une des pires tragédies du XXe siècle, la déportation et l'extermination de millions de juifs au seul motif qu'ils étaient juifs (l'URSS de Staline n'était d'ailleurs pas en reste). Pour les mêmes raisons racialistes, 500 000 tziganes, des Noirs, des handicapés, des homosexuels... ont subi le même sort.
Nous n'oublions pas l'histoire dont nous sommes les héritiers.
Pour le Collectif Palestine, des origines jusqu'à maintenant, il n'a jamais été question de se situer sur un terrain racialiste (les Juifs contre les Arabes) ou religieux (les juifs contre les musulmans et les chrétiens).
Nous composions un collectif laïque défendant une cause politique : celle du droit des Palestiniens et Palestiniennes à vivre sur une terre aux frontières sûres et reconnues et à choisir démocratiquement leur statut politique et leur organisation socio-économique.
Dans ce sens, nos organisations ont défendu celles dont les Palestiniens se sont dotés dans leur mouvement de libération contre l'occupation israélienne et la colonisation (OLP regroupant le Fatah, le FPLP, le FDLP...), nous avons soutenu la résistance civile contre le siège militaire des villes de Cisjordanie en 2002, la résistance des Palestiniens contre la construction du Mur d'apartheid, la résistance des paysans contre l'accaparement des terres et de l'eau, la résistance contre les exactions des colons, puis le blocus de Gaza.
Nous nous opposions à la guerre et aux persécutions de l'Etat sioniste en nous appuyant sur le droit des peuples à l'autodétermination, qui vaut pour tous les peuples et partout, que ce soit en Palestine, au Kurdistan irakien, iranien, syrien et turc, en Kanaky, en Afghanistan ou en Chine...
Bien sûr, depuis longtemps, et encore davantage depuis le 7 octobre 2023, nos adversaires politiques, tous ceux qui soutiennent l'État colonial israélien, ses gouvernements et son armée, ont cherché à criminaliser l'antisionisme en le faisant passer pour la nouvelle forme de l'antisémitisme. Ainsi, des forces de gauche, des militants pro-palestiniens ont été accusés et sont encore poursuivis pour délit d'antisémitisme en France, en Allemagne, aux États-Unis, du simple fait de dénoncer, par exemple, le génocide en cours à Gaza.
Nous ne sommes pas dupes.
Nous ne sommes dupes d'aucun subterfuge, d'où qu'il vienne.
Nous savons aussi que l'antisémitisme, le vrai, n'a pas disparu, qu'il est toujours porté par l'extrême-droite française, Jean-Marie Le Pen, fondateur du FN, comme les groupes néonazis et les identitaires d'aujourd'hui.
L'antisémitisme émane aussi de groupes islamistes, de groupes complotistes, de groupes négationnistes, qui prolifèrent et répandent leur venin sur internet...
D'où qu'il vienne, l'antisémitisme doit encore et toujours être combattu, autant que toutes les formes de racisme, le racisme anti-Arabes, anti-Noirs, anti-Asiatiques, et toutes les formes de discriminations : du fait de la couleur de peau, de l'apparence physique, du genre, de la croyance, de l'orientation sexuelle...
Mais nous ne pensons pas que, dans le Collectif Palestine élargi d'aujourd'hui, ces valeurs d'égalité des droits pour tous les êtres humains soient reconnues par tous.
De vieux tweets postés par l'un de ses membres, et toujours en circulation 10 ans plus tard (jusqu'à fin septembre 2024), en attestent : "Comment le lobby juif contrôle la France", "Les juifs sont-ils des lézards extra-terrestres ?", "Comment Hitler a cofondé Israël en 1933 avec les Juifs sionistes", "Nous vivons sous domination de la synagogue financièro-talmudique"...
Ces posts abondamment relayés sur les réseaux sociaux sont indubitablement antisémites.
Mais leur auteur ne les reconnaît pas comme tels : pour lui, ils ont seulement un caractère antisioniste et prétendre le contraire n'est qu'allégation mensongère.
Qu'une personne qui relaie des thèses complotistes, négationnistes, fortement imprégnées d'antisémitisme, ne veuille pas reconnaître ses torts, constitue déjà pour nous un déni inacceptable. Mais que des militants d'organisations de gauche la confortent dans ce déni et, ainsi, l'encouragent à surenchérir dans ses certitudes d'être victime de calomnies indignes, c'est proprement sidérant !
Ainsi soutenu, l'intéressé a vu sa place légitimée dans le Collectif et, par suite, a refusé de s'en mettre en retrait, comme nous le lui avons demandé pendant plusieurs semaines.
Aujourd'hui, 7 octobre 2024, face à de telles distorsions vis-à-vis des valeurs éthiques et politiques que nous portons dans la lutte pour les droits du peuple palestinien, nous décidons de suspendre notre participation à la structure informelle dite "Collectif Palestine élargi de Besançon".
Ayant quitté sa dernière réunion dès le constat que la rupture était inévitable, nous ne pouvons plus être associés à ses décisions et demandons désormais que nos sigles soient retirés de toutes ses formes de communication.
Signataires :
UD CGT du Doubs, Union syndicale Solidaires 25, PCF, Parti de Gauche, A Gauche Citoyens !, Génération.s, Mouvement de la Paix, MRAP.
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Le NPA-l’Anticapitaliste se retirera également du Collectif.
LFI en sortira ponctuellement.
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Dans les semaines suivantes les organisations suivantes, parmi les plus importantes du Collectif, annoncent qu'elles resteront dans le Collectif : Ensemble!, Les Écologistes, LFI, LDH, FSU, Palestine Amitié, Génération's.
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Développements suivants :
Le 15 mars 2025, la Coordination nationale de BDS France exclut le comité local de Besançon, créé fin 2023 par le même individu controversé. Le 20 mars la décision est officiellement mise sur le site de BDS France :
« Le comité BDS Besançon est dirigé par une personne qui a produit des posts antisémites, anti LGBT et anti Kurdes, et a refusé de revenir sur leur contenu, le comité BDS Besançon tout entier continue de soutenir cette personne et adopte avec lui la qualification « d’antisioniste » et « défense de la famille » pour ses posts. Ces positions constituant une violation de la charte BDS France et de la charte du BNC palestinien, la coordination nationale décide que ce comité ne peut faire partie de la campagne BDS France, et ne peut utiliser le sigle de la campagne. Le BNC sera informé de cette décision. Ce communiqué sera mis sur le site de BDS France »
https://www.bdsfrance.org/besancon-decision-de-la-coordination-nationale-bds-france/
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L'UJFP (Union Juive de France pour la Paix) n'a jamais eu de section à Besançon et l'organisation nationale n'était pas concernée par le débat dans le Collectif local. Elle vient de suspendre Mustafa Cakici qui s'était inscrit à l'UJFP en trompant sa vigilance. Voici son communiqué :
Mise au point de la Coordination nationale de l’UJFP, le 17 octobre 2025
Mustafa Cakici vient d’être démis de ses fonctions de porte-parole de la flottille Waves of Freedom pour ses propos antisémites, homophobes et contre le mouvement d’autonomie des kurdes. Si tout le monde peut changer, en l’occurrence Mustafa Cakici assume ses propos relayés par des centaines de posts depuis 10 ans et considère des propos antisémites comme étant antisionistes. Cette position ne peut servir la cause palestinienne et ne fait qu’entretenir la confusion. L’UJFP soutient cette décision de la flottille à l’encontre de Mustafa Cakici.
Il apparaît que celui-ci s’est réclamé de son appartenance à l’UJFP. Cette personne a effectivement adhéré à l’UJFP en ligne ; aucune enquête a posteriori n’a malheureusement été effectuée. Mustafa Cakici n’a jamais participé à quelque réunion de l’UJFP que ce soit et n’a jamais pris quelque position ou décision que ce soit au nom de l’association.
La Coordination nationale, conformément à nos statuts, suspend immédiatement Mustafa Cakici, compte tenu de ses propos et positions contraires aux fondamentaux et aux engagements de l’UJFP et en totale contradiction avec les valeurs de notre association.
La Coordination nationale soumettra une proposition d’exclusion à la prochaine Assemblée générale.
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La suite, c'est l'exclusion de Mustafa Cakici de la Flottille pour Gaza, où il était parvenu à se hisser au plus haut niveau de responsabilité…
Il est heureux que l'imposteur ait été démasqué au niveau international. Il reste à reconstruire à Besançon sur des bases saines un mouvement de solidarité avec le peuple Palestinien.