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Billet de blog 14 décembre 2025

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De la naissance des États-Unis à Trump : la longue vie du racisme

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Illustration 1

« Lorsque le Mexique envoie ses ressortissants, il n'envoie pas les meilleurs. Il nous envoie des gens qui ont beaucoup de problèmes, et ils apportent ces problèmes avec eux. Ils apportent de la drogue. Ils apportent le crime. Ce sont des violeurs. Mais certains, je suppose, sont des gens bien. » Ces propos tenus par le candidat à la présidence Donald Trump, le 16 juin 2015, ont été repris par la presse mondiale et les Mexicains se sont sentis agressés, mais cela importait peu à Trump. 

En août de la même année, deux mois avant les élections, il avait déclaré, selon le New York Times et CNN, parmi de nombreux autres médias : « Je demande le vote de chaque Noir de ce pays. Qu'ont-ils à perdre ? Ils vivent dans la pauvreté, leurs écoles sont mauvaises, ils n'ont pas de travail, 58 % de leurs jeunes sont au chômage. Qu'ont-ils à perdre, bon sang ? ». 

Le Washington Post et le New York Times publièrent le 18 décembre 2017 qu'en juin 2017, lors d'une réunion à la Maison Blanche, le président Trump aurait déclaré que les immigrants Haïtiens « ont tous le sida ». Au sujet des Nigérians, il aurait dit, qu'après avoir découvert les États-Unis, « ils ne retourneront jamais dans leurs huttes en Afrique ». 

Le magazine Fortuna et l'International Business Times, dans leur édition du 7 juin 2017, ont rapporté que d'anciens employés des casinos de Trump l'auraient entendu dire : « Les Noirs comptent mon argent ! Je déteste ça !... Je pense que ce type est un fainéant. Et ce n'est probablement pas de sa faute, car la paresse est un trait caractéristique des Noirs ».

Le 11 janvier 2018, selon le Washington Post et confirmé par CNN, lors d'une réunion sur l'immigration, Trump aurait qualifié Haïti, les pays africains et le Salvador de « shithole countries » (pays de merde/pourris). Et a demandé : « Pourquoi laissons-nous entrer tous ces gens issus de pays de merde ? » Il a déclaré préférer les immigrants provenant « d'endroits comme la Norvège ». Ce qui a suscité des réactions dans le monde entier, y compris à l'ONU. 

En janvier 2018, lors d'une réunion avec les législateurs de son administration, Trump a exprimé son opinion sur l'immigration en provenance de certains pays : « Nous sommes une décharge. Nous sommes comme une poubelle pour le monde [...] C'est la première fois que je dis poubelle. Mais vous savez quoi ? C'est une description très juste. »

Le 14 juillet 2019, dans une série de tweets adressés à quatre membres démocrates du Congrès, d'origine immigrée, il a écrit sans toutefois mentionner leurs noms: « [elles] disent avec rage au peuple des Etats-Unis, la nation la plus grande et la plus puissante de la Terre, comment notre pays doit être gouverné. Pourquoi ne retournent-elles pas s’occuper des endroits totalement détruits et infestés de criminalité d'où elles viennent ? » Trois d'entre elles étaient nées aux États-Unis et la quatrième y était arrivée enfant. 

Selon PBSNews, le 6 juillet 2020, Trump aurait déclaré : « Nous expulsons des gens du pays... Ce ne sont pas des personnes. Ce sont des animaux ».

En août 2024, lors d'une interview, il a affirmé que les Vénézuéliens qui se trouvent aux États-Unis « sont des trafiquants de drogue, des criminels, des meurtriers et des violeurs », ajoutant que le gouvernement du président Nicolás Maduro « les avait transférés aux États-Unis » et que, de ce fait, la criminalité avait considérablement diminué au Venezuela. Il n'a cité aucune source. En avril, il avait déjà fait une déclaration similaire lors d'une interview avec Fox 2, à Detroit, et donné des chiffres. Le journaliste lui ayant demandé : « D'où viennent ces chiffres ? », Trump avait répondu : « Je crois que dans ce cas, je les ai trouvés dans les journaux, je pense que c'est une déclaration fédérale. Ou plutôt, en fait, ils viennent du Venezuela. Ils viennent du Venezuela ». 

Lors d'une réunion à la Maison Blanche, le 4 décembre 2025, il a déclaré à propos des Somaliens : « Je ne veux pas d'eux dans notre pays. ... Leur pays est pourri. Ils sont inutiles. Ils ne font rien. Ils n'apportent rien. Et en plus, je ne veux pas qu'ils entrent dans le pays. » Il les a également qualifiés de « garbage » (ordures), selon The Guardian et Reuters

Ce ne sont là que quelques exemples de la mentalité raciste et xénophobe de Donald Trump, qui est représentatif de l'essence même du régime étasunien, un système qui était en gestation avant même que les États-Unis ne portent ce nom. Le racisme, la xénophobie et la violence, tant verbale que physique, à l'encontre de ceux qui n'appartiennent pas à leur définition des « Blancs » (c'est-à-dire à la peau pâle), anglophones et protestants, font partie d'un héritage profondément ancré. Les suprémacistes « aryens », qui se considèrent comme bénis par Dieu, le portent dans leurs gènes. 

Illustration 2

Voyons voir : 

Bien que la Déclaration d'indépendance du 4 juillet 1776 stipule que « tous les hommes sont créés égaux ; qu'ils sont dotés par leur Créateur de certains droits inaliénables ; parmi lesquels la vie, la liberté et la recherche du bonheur », les natifs, propriétaires millénaires de ces terres, sont qualifiés d'« Indiens sauvages et impitoyables », ce qui leur a même valu d'être privés de leur citoyenneté.

En 1830, le gouvernement d'Andrew Jackson, militaire, propriétaire terrien esclavagiste, raciste parmi les racistes et président entre 1829 et 1837, fit officialiser par le Congrès ce qui était déjà un fait depuis près d'un siècle, en approuvant l'Indian Removal Act (loi sur le déplacement forcé des Indiens). En d'autres termes, la déportation vers des lieux qui convenaient aux intérêts expansionnistes.

Dans un discours prononcé en 1892, le colonel Richard Henry Pratt rejoignait l'avis d'un collègue en déclarant que « le seul bon Indien est un Indien mort », avant de préciser : « Tout ce qu'il y a d'indien dans la race devrait être mort. Tuez l'Indien en lui, et sauvez l'homme ». Peu avant son entrée en fonction en tant que président (1901-1909), Theodore Roosevelt s'était exprimé à ce sujet : « Je n'irais pas jusqu'à dire que le seul bon Indien est un Indien mort, mais je pense que neuf sur dix le sont. Et je ne voudrais pas examiner de trop près le dixième ».

Si un jour les natifs ont été autorisés à avoir une âme, les esclaves noirs ont dû attendre des siècles avant d'être considérés comme des êtres humains. Thomas Jefferson, principal rédacteur de la Déclaration d'indépendance, secrétaire d'État, vice-président, troisième président (1801-1809) et grand passionné de possession d’esclaves, écrivait en 1785 que les Noirs étaient « maudits » et « inférieurs », « incapables de produire de l'art et de la poésie », raison pour laquelle « les États-Unis ne pourraient jamais être une nation où Blancs et Noirs vivraient en communion ».

Le racisme suprémaciste ne visait pas seulement les Indiens et les Noirs, mais aussi les Irlandais, les Juifs, les catholiques, les Chinois, les Latinos et d'autres catégories dites minoritaires. L'« Amérique blanche » et « aryenne » voyait en eux une « menace » pour la « survie » anglo-saxonne. 

Les dirigeants politiques ont alimenté ce mépris, et l'un des plus virulents fut Theodore Roosevelt. Ce petit-fils de trafiquants d'opium en Chine déclara devant le Parlement de New York que les Irlandais étaient « un peuple stupide et vicieux, manquant d'intelligence et de vertu (...). L'Irlandais catholique est grossier, vénal, corrompu et peu intelligent ». Après les Noirs, les Irlandais furent également les esclaves et semi-esclaves de cette nation.

Les Juifs faisaient aussi l'objet de restrictions sociales et politiques drastiques, même dans les clubs et les centres touristiques. Dans de nombreux quartiers ou municipalités, la vente de propriétés aux Juifs était interdite. Certains hôtels affichaient : « Les Hébreux ne sont pas admis ». Le livre du célèbre industriel Henry Ford, « The International Jew » (Le juif international), a été salué par Adolf Hitler dans son ouvrage « Mein Kampf » (Mon combat), où il présente Ford comme ce « grand homme » qui comprenait le « problème juif ». 

Le 24 juillet 1877, des centaines d'hommes descendirent dans les rues de San Francisco, sous la houlette de l'organisation syndicale Workingmen's Party of California, avec pour slogan « Chinese must go ! » (les Chinois doivent partir), qui canalisait le mécontentement social lié à la crise économique. Des commerces, des maisons et tous les Chinois qui se trouvaient sur leur chemin furent attaqués. Les Chinois étaient présentés comme « des gens sales et immoraux, qui apportent des maladies et menacent de ruiner la main-d'œuvre blanche ». Dans les archives du Département d'État, on trouve des commentaires recueillis dans les rues : « Admettre les Chinois aux États-Unis dégrade les normes culturelles et morales de la société », en menaçant « l'intégrité de la composition raciale étasunienne ». 

Le 6 mai 1882, le président Chester A. Arthur signa le Chinese Exclusion Act (loi d'exclusion des Chinois). Cette loi interdisait l'entrée aux États-Unis à davantage de travailleurs chinois pendant dix ans. C’était la première loi étasunienne à interdire l'immigration en fonction d'une race spécifique. Ce fut le point culminant de la haine raciale. 

L'invasion et le pillage du Mexique, qui entraînèrent la perte de 55 % de son territoire, ont été justifiés par des critères racistes, et aussi par le mysticisme. Le Cincinnati Daily Gazette, de l'Ohio, déclarait en 1846, en pleine guerre : « Même si les barbares pleuvent comme la grêle, leur chute est inévitable, car ils sont destinés à être détruits par le rayon du Destin manifeste [...] la perte de quelques milliers d'entre eux n'est pas si déplorable. Cette guerre apprendra à tous les Mexicains à réfléchir à leur faiblesse et à leur infériorité. »

Alors qu'il était président, James Monroe reçut une note de son conseiller Alexander Scott dans laquelle celui-ci lui assurait : « Les Vénézuéliens sont timides, indolents, ignorants, superstitieux et incapables d'entreprendre ou de faire des efforts. Je crains qu'ils n'aient pas atteint ce niveau de dignité humaine qui permet à l'homme de jouir d'un gouvernement libre et rationnel. »

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