"Crise : faites vos jeux !"

Bon nombre d'experts, et, parmi eux, les moins bien intentionnés, nous expliquent, à nous, qui sommes censés être les pauvres victimes hébétées des excès du capitalisme, bref, de la crise, que celle-ci est une chance. Pour qui ? Pour tous ceux qui non seulement auront le courage de l'affronter sur son propre terrain, le terrain de l'argent, mais feront preuve d'initiative, d'adaptation, d'intégration, grâce à leur flair et leur savoir-faire. Les spécialistes de la propagande financière, qui voient la crise comme un grand casino mondial dont on peut tirer parti, nous disent une seule et même chose, sous diverses formes : "Crise : faites vos jeux !" Ils nous disent qu'on voit déjà les effets bénéfiques de la crise, que les meilleurs, ceux qui anticipent et prévoient, s'en sortiront très bien, que les pleurnicheries et les lamentations ne sont pas de mise, que les moins bien armés pour combattre la crise feraient bien de se regarder dans la glace. Ils reconnaissent que la crise fait des dégâts, mais ils répondent que l'argent étant le seul remède contre elle, se ranger du côté de l'argent, de l'argent devenu moralisé, est absolument nécessaire. Ils nous chantent que le capitalisme, malgré ses faiblesses, toujours passagères, nous garantit, contre toutes les tentations émancipatrices et égalitaires, une relative tranquillité. Ils nous assurent que le capitalisme est une promesse, qu'il prépare un monde meilleur, compte tenu de tous les dangers qui menacent... le capital.