6 – « Laisser être et rendre puissant ». Le « laisser être » de Tristan Garcia enchante en ce jour le vieillard que je suis, vivant la diminution de ses capacités physiques et mentales dans l’effondrement des valeurs qui, au cours des trois décennies sinon glorieuses, au moins « espérantes » et « entreprenantes » par lesquelles a débuté sa vie adulte, ont meublé cette vie. Pèse surtout cette solitude intellectuelle de ne pouvoir échanger sur « Être », le « il est » de Parménide, dévoilé par Ricoeur (supra 2), qu’il a un peu apprivoisé.
Même chez Garcia le « il est » n’est pas socle mais résidu et, de si actuel, devient un « possible ». Einstein n’y découvrirait pas son « Maintenant ».
Puissant, pour qualifier l’apprivoisé n’est pas le mot qui vient aux lèvres. Libre se marie si bien avec laisser. Laisser n’est pas attendre d’ailleurs que le boulot soit fait. Gagner un peu plus que son pain, et partager celui-ci, il ne tombera pas du ciel. La musique de Haendel est belle, les paroles sont bien datées. Notre Messie, ce sont nos libertés. Libérons les de trop de soumission à nos egos et que le socialisme, sans la propriété, redevienne l’évidence du monde qui un jour se percevra répondre, presque, à notre attente, celui qui correspond à ce socle ontologique que révèle Ricoeur.
Presque, rien n’est jamais fini qui n’a jamais commencé. La puissance de Garcia redevient comme une liberté quand la subjectivité accepte de s’éclipser afin qu’une autre prenne le relai. Mais le « il est » est bien impuissant pour demander un sacrifice qui le nie. Être et liberté ne peuvent se dissocier, le premier est le porteur porté de la seconde (v. mon essai, « Être Liberté », éditions 3 colonnes).