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Billet de blog 9 mai 2024

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Bulletin mensuel des observations des expulsions dans le Calaisis - Janvier 2024

En janvier 2024, 101 expulsions de lieux de vie informels dans la région du Calaisis ont été observées par HRO.

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Cette note mensuelle reprend nos observations pour le mois de Janvier 2024. Les entraves aux observations étant nombreuses, ces chiffres sont à prendre comme un extrême minima.

Chiffres concernant les expulsions des lieux de vie informels :

  • au moins 101 expulsions de 16 lieux de vie informels
  • au moins 92 tentes dont au moins 3 remplies d’affaires personnelles volées
  • au moins 27 personnes exilées arrêtées lors des expulsions dont au moins 4 en utilisant de la violence
    physique
  • au moins 120 palettes, 4 chaises et 5 matelas volés, ainsi que beaucoup de bois, essentiel pour se réchauffer autour de feux
  • au moins 6 vélos volés, ainsi que 5 téléphones et batteries
  • au moins 29 mineur.e.s isolé.e.s étranger.ère.s rencontré.e.s

Dans le cadre de la politique de « lutte contre les points de fixation », ces opérations de harcèlement consistent à forcer les personnes exilées à déplacer leurs tentes quotidiennement de 2 à 500 mètres entre 8h et 19h, mais également à saisir ou détruire des biens de première nécessité et/ou des affaires personnelles***.

Dans le Calaisis, un lieu de récupération des affaires a été mis en place sans que les personnes ne soient informées systématiquement de son existence par les membres de la Préfecture ou les forces de l'ordre. HRO a reçu plusieurs témoignages de personnes qui affirment ne pas avoir été mises au courant du système de récupération des affaires.

Ces opérations sont accompagnées de contrôles d’identité souvent abusifs (Cour de cassation, 25 avril 1985, n° de pourvoi 84-92916) et donnent lieu à des arrestations puis placements en rétention administrative alors illégaux. 

Illustration 1
18 janvier 2024, les personnes exilées attendent la fin de l'expulsion et des saisies menées par les forces de l'ordre.

Durant les opérations d'expulsions, les membres HRO ont été témoins d'intimidations violentes envers les personnes exilées. En assumant pleinement le caractère non-exhaustif, nous avons documenté entre autres les intimidations suivantes perpétuées par les forces de l’ordre à l’encontre des personnes exilées: 

  • Le 2 janvier, les forces de l’ordre détruisent de nombreux abris sur les lieux de vie et mettent des coups de pieds dans les tentes occupées par des personnes exilées en criant “allez, allez!”. En voyant un chat, un CRS dit “ils vont le manger”.
  • Les 2 et 4 janvier, à deux reprises, des CRS urinent sur les lieux de vie.
  • Le 6 janvier, les forces de l’ordre refusent de s’adresser aux personnes exilées autrement qu’avec des signes de mains et détruisent
    entièrement leur lieu de vie.
  • Le 16 janvier, une personne exilée est blessée à la suite d’une arrestation par des agents de la Police Aux Frontières. La personne boite et son téléphone lui est confisqué par les forces de l’ordre.
  • Le 18 janvier, une personne exilée fuit en courant le lieu de vie pour se protéger et glisse sur une plaque de verglas, ce qui suscite
    l’amusement des CRS. Sur un autre lieu de vie, la situation se reproduit lorsqu’une personne exilée se fait poursuivre par un CRS.
  • Le 20 janvier, un CRS utilise sa matraque pour secouer les tentes et réveiller les personnes qui les occupent.
  • Le 25 janvier, les CRS empêchent une personne exilée de récupérer ses affaires et l’expulsent immédiatement.

Lors de toutes les opérations, HRO a noté le surarmement des forces de l'ordre qui sont très souvent équipées de LBD, de bombes lacrymogènes, de tonfas, de boucliers, de casques... Cet armement est intimidant et disproportionné au regard des opérations dont il est question.

Illustration 2
18 janvier 2024, lors d'une des expulsions quotidiennes, un CRS éteint le feu qui apportait un peu de chaleur aux personnes exilées face aux faibles températures de l'hiver.

Les entraves à l'observation sont nombreuses. Sans compter les périmètres arbitrairement déployés pour empêcher l'observation des opérations par HRO, 46 tentatives d'intimidation et/ou d'entraves ont été enregistrées. Parmi celles-ci, les membres HRO ont été filmé.e.s sans avoir été prévenu.e.s au préalable au moins 15 fois, dont 2 fois avec des téléphones personnels, et se sont vu.e.s contrôler leur identité à 4 reprises.

Harcèlement des observateur.rice.s lors des expulsions :

Lors des opérations d’expulsions, le travail d’observation des équipes HRO est régulièrement empêché par les forces de l’ordre qui usent de différentes pratiques d’intimidations en s’appuyant sur l’affirmation suivante : “le droit c’est nous de toute façon” (CRS, le 16 janvier).

Le ton employé par les CRS pour s’adresser aux membres de HRO est régulièrement déplacé. Le 16 janvier, un CRS n’hésite pas à qualifier une membre de l’équipe de “petite coquine” lorsqu’elle s’avance au périmètre et renchérit : “vous êtes une gamine”.

La prise d’enregistrements vidéo est régulièrement à l’origine d’intimidations, voire de menaces de la part des CRS à l’égard de HRO. Le 10 janvier, un CRS lance à son collègue, en parlant d’HRO : “je l’ai bien filmée, elle”. Le 18 janvier, des CRS filment les visages des membres HRO, de très près. Le 27 janvier, l’enregistrement par une bénévole HRO a été utilisé comme prétexte par un agent pour effectuer uncontrôle d’identité durant lequel il a utilisé son téléphone personnel pour prendre en photo son passeport.

Le 16 janvier, le véhicule HRO se fait suivre par un van de CRS. A l’arrivée sur le lieu de l’expulsion, les CRS rattrapent HRO, les filment, se moquent de l’accent et de la tenue de l’une d’entre elles. Les intimidations passent aux violences physiques lorsqu’un CRS pousse une membre HRO dans un fossé bordant le lieu de vie.

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