La mise en examen de Jacques Chirac soupçonné de création d'emplois fictifs a été considérée dans un billet publié sur ce site comme un « énorme » scandale prouvant l'inanité du suffrage universel sans condition de compétence.
Rappelons
qu'une mise en examen ne veut pas dire culpabilité (à moins que l'on bafoue les principes de justice élémentaire)
que J. Chirac est impliqué non en tant que président de la république élu au suffrage universel mais en tant que maire de Paris exclusivement élu par les conseillers de la capitale
Et c'est donc pour cela (!) qu'il faudrait remettre en cause l'institution du suffrage universel actuel (incluant les femmes), institution qui a désormais 65 ans au cours desquels, en France:
a) l'extrême droite n'a pu accéder qu'à des responsabilités marginales,
b) le parti communiste (à l'époque où il était très influent et tenait l'URSS pour un modèle et un allié privilégié) a pu faire progresser des droits sociaux mais n'a jamais pu exercer d 'hégémonie politique à l'échelon national,
c) il n'y a eu qu'une tentative, rapidement avortée, de putsch militaire,
d) quels que soient les défauts qu'on puisse reprocher à la société française, depuis 65 ans le niveau de vie, le niveau d'instruction et l'espérance de vie ont sensiblement progressé y compris dans les classes populaires,
e) la peine de mort ainsi que la pénalisation de l'avortement et de l'homosexualité ont été abolies tandis qu'en revanche la répression a été renforcée contre les injures et actes antisémites et racistes,
f) la parité hommes/femmes, aussi insuffisante soit-elle encore, a progressé dans de nombreux domaines, etc.
Est-il raisonnable d'affirmer, en se fondant sur un soupçon sans lien direct avec le suffrage universel, qu'il faudrait instituer un permis de voter, soumis périodiquement à examen, qui réintroduirait en France une inégalité civique fondamentale, créerait une classe de parias, sous-citoyens, exclus du droit d'exprimer leur opinion sur les politiques qui influencent leur vie et les personnalités qui les gouvernent. Il n'est pas difficile d'imaginer que ces parias se recruteraient principalement dans les catégories les plus vulnérables, celles qui ont le plus de difficulté avec la langue française et le maniement de notions abstraites (comme le sont les principes institutionnels), celles qui sont déjà le plus souvent exclues de l'accès aux diplômes et à celui des emplois stables, ou bien encore dans des franges de personnes âgées fragilisées par la maladie. Et alors que des banksters et autres truands d'affaires en cols blancs continueraient à voter, on pourrait retirer le droit de vote, déchoir de leur citoyenneté, des anciens blessés et prisonniers de guerre, de travailleurs illettrés ou sous-instruits mais ayant activement contribué à construire le pays avec leur sueur, à alimenter avec leurs impôts et cotisations les ressources publiques, ayant parfois apporté bénévolement leur contribution à des associations d' aide sociale ou des opérations de secours. Pour couronner le tout, il y aurait en classe d'instruction civique à l'école, des enfants de parias, qui auraient vite la possibilité d'apprendre ce qu'est la honte de ses parents et l'expérience du stigmate.
humaro (Louis Gruel)
PS La dernière fois que l'auteur du billet avait trouvé une preuve éclatante de la nécessité de son permis de voter, c'était parce qu'un sondage commandité par un magazine avait attribué une forte cote de popularité à un ministre fraîchement nommé. Ne doutons pas qu'une prochaine "preuve" éclatante lui permettra prochainement de réitérer la mise en vente de ses remèdes miracles.