Chacun aura pu observer à quel point les commentaires de la mort Michael Jackson ont écrasé le reste de l'information écrite et audio-visuelle, et ont été assénés avec une hypocrisie confondante (« l'actualité nous dicte... », « ce journal commence évidemment par... », « nous reviendrons bien sûr longuement... »). C'est ainsi qu'à de rares exceptions( dont un billet un peu tardif du Monde) les grands organes de presse n'auront pas signalé la mort du Père Cardonnel, intervenue le 4 Juillet.
Bien que je sois mécréant depuis l'âge de 12 ans, j' avoue que Jean Cardonnel a compté pour moi autrement qu'un talentueux mais ambigu «Roi de la Pop ». A travers son animation de la revue dominicaine « Fréres du Monde » qui, dans les années 60, a contribué à faire prendre conscience des souffrances des peuples d'Afrique, d'Amérique latine et d'Asie. A travers sa contribution en 1970 à la fondation du Secours Rouge, mouvement de lutte contre la répression politique mais aussi – déjà – contre les conditions dégradantes imposées à tous les internés en prison: il était des dix-sept du Comité d'Initiative, aux côtés de prestigieux résistants ayant rompu avec le stalinisme, de grandes figures de la lutte contre la torture et l'oppression coloniale en Algérie, de personnalités représentatives des combats d'émancipation des années 68-70. A travers aussi sa capacité à moquer le conservatisme, les dorures et les asservissements institutionnels de l'Eglise, au point d'écrire dans la tribune d'un grand quotidien, en 2000: « La flagornerie, surtout papimaniaque, n'a pas de plafond ». Salut et merci « frère » dominicain, mort dans presque dans l'ombre parce que la frivolité moutonnière des majors de la presse n'a pas de plafond.