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Billet de blog 26 avril 2011

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Lettre ouverte à Philippe Caubère et à mes amis de gauche qui disent n'importe quoi sur la prostitution

 Cher Philippe Caubère, chers amis. Dans l'édition du journal Libération datée du 14 avril, vous avez, cher Philippe Caubère, pris la plume pour défendre les amours tarifées. Au nom de la liberté, vous défendez les clients des prostituées qu'un projet de loi en préparation prévoit de pénaliser.

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Cher Philippe Caubère, chers amis. Dans l'édition du journal Libération datée du 14 avril, vous avez, cher Philippe Caubère, pris la plume pour défendre les amours tarifées. Au nom de la liberté, vous défendez les clients des prostituées qu'un projet de loi en préparation prévoit de pénaliser. Au nom de la liberté et d'une fausse évidence qui veut que la prostitution soit un droit naturel, un état de fait présenté comme immuable. Encore un peu, et vous nous chanterez la douce musique de la défense des traditions. Le plus vieux métier du monde, comme on dit.

En ce qui me concerne, je me méfie du « de tous temps, les hommes », dont on sait bien qu'il n'est pas un argument. De tous temps, des guerres. De tous temps, des crimes. De tous temps, des hommes exploitent d'autres hommes. Est-ce une raison pour ne pas s'opposer à la guerre, pour ne pas combattre le crime ou pour refuser l'exploitation ? En quoi, la prostitution relèverait-elle d'une logique fondamentalement différente?

La prostitution perpétue l'exploitation du corps des femmes. Parce qu'il s'agit très majoritairement de femmes, de jeunes femmes, parfois à peine majeures. Elu du 18ème arrondissement, je ne peux pas fermer les yeux quand je vois ces filles à peine sorties de l'adolescence qui font le trottoir. La prostitution fait du corps de l'autre un objet évalué, côté, monnayé. Marchandable. Certes, « de tous temps », certains ont volé le corps des femmes. Est-il aburde, a fortiori lorsqu'on est de gauche, de se battre pour un monde sans prostitution, sans le chantage d'un client qui exploite la misère d'un être humain pour lui acheter ou lui « louer » (je reprends votre expression, cher Philippe Caubère) son corps ? Sans concurrence, sans bordels ni maisons closes à rouvrir. Un monde où la sexualité est librement consentie, selon une relation gratuite, entre deux êtres humains égaux.

On a peine à saisir cette étrange maladie qui semble avoir frappé une partie de la gauche. Car la fameuse « liberté » du client qui se trouverait pénalisé par ce projet de loi n'est rien d'autre que celle du renard dans le poulailler. Quand on est de gauche, pourtant, on combat l'exploitation et on combat celui qui exploite. L'esclavage de ces milliers de femmes est orchestré par des proxénètes et entretenu par des clients. Il convient donc de poursuivre les uns comme on condamne les autres et d'en finir avec une législation absurde qui et laisse les clients tranquilles et condamne les prostituées pour racolage passif.

Vous vous trompez de combat. Vous parlez de liberté, moi aussi - celle de ces femmes. Vous vous retranchez derrière le défaitisme et le pessimisme social, je veux mettre en avant un progrès partagé par tous. Vos arguments trahissent notre désir de transformation sociale. La liberté sexuelle n'a rien à voir avec la prostitution. La liberté sexuelle s'acquiert en refusant le tout marchand. En donnant le droit à tous de choisir sa sexualité et ses partenaires. Et non pas en concédant, comme vous le faites, à certains le faux droit de ne pas choisir ses partenaires et en accordant à d'autres le droit exorbitant de se considérer comme des consommateurs banals.

Ne vous égarez pas plus longtemps.

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